Position publique : la loi immigration contrevient à la santé publique
- Publication
- 22.12.2023
La loi immigration contrevient à la santé publique
Position publique du comité de pilotage des 10 Choix Politiques pour en finir avec le sida. Cette position est un état des lieux fondé sur les propositions faites en juillet 2023 pour améliorer l’accès à la santé des personnes en exil sur notre territoire.
Le gouvernement et le Parlement ont fait le choix de détériorer le droit à la santé pour tou.te.s en fondant leur décision sur des critères qui nient la rationalité scientifique. Le résultat est à la fois contre-productif pour la santé, les finances publiques et indigne sur un plan éthique. Force est de constater que la loi « contrôler l’immigration, améliorer l’intégration » est délétère et va rendre quasi impossible l’objectif de la France d’en finir avec le sida en 2030.
Conditionner l’accès au titre de séjour pour soins à la disponibilité des traitements dans le pays d’origine et non à leur accès effectif atteint gravement à la possibilité pour ces personnes de se soigner. De même, la suppression de la tarification solidarité transport est une entrave profonde à l’accès aux soins.
Les prochains mois seront décisifs avec une possible réforme de l’Aide Médicale d’Etat. Notre mobilisation, historique dans sa forme, pérenne dans sa force, ne faiblira pas.
Depuis plusieurs mois, et de manière unanime, soignant.e.s, sociétés savantes, chercheur.e.s, associations centrées sur la santé, les droits fondamentaux, le handicap, la migration, la Défenseure des Droits, le Conseil national du sida et des hépatites virales, le Comité Consultatif National d’Ethique, etc rappellent que prendre soin des plus fragiles est bénéfique pour notre humanité commune, notre économie et notre système de santé.
Depuis plusieurs mois, nous rappelons combien permettre à tous et toutes d’accéder à des soins primaires de qualité est la meilleure option pour que la population dans son ensemble reste en bonne santé : pour contenir les épidémies, tout le monde doit avoir accès au dépistage, aux traitements et aux outils de prévention afin de ralentir les nouvelles transmissions, ainsi qu’aux traitements car une personne sous antirétroviraux ne transmet pas le virus. Les virus sont aveugles au statut administratif des personnes qu’ils infectent. Il est inconcevable d’envisager qu’une personne vivant avec le VIH ne puisse être soignée sur notre territoire.
Depuis plusieurs mois, nous diffusons les données issues de la science et des savoirs expérientiels qui démontrent que :
- Non, l’Aide Médicale d’Etat (AME) et le droit au séjour pour soins ne provoquent pas d’effet « d’appel d’air » ou de « tourisme médical ». Au contraire, les constats scientifiques et les observations des acteurs de terrain convergent : les personnes méconnaissent leurs droits et renoncent souvent aux soins ;
- Non, le budget de l’AME n’est pas en dérive : le budget global de l’AME représente environ 0,5% de celui de l’Assurance Maladie, proportion stable depuis des années ;
- Oui, c’est une fois sur le sol français que la santé des personnes en situation de migration ou d’exil se dégrade, ce qui démontre l’intérêt collectif de garantir des conditions d’accueil et de vie décentes et un accès au système de santé et à la prévention ;
- Oui, l’accès universel à la prévention et à aux soins primaires réduit les coûts de santé : plus la détection des pathologies est précoce ou plus elles font l’objet de prévention, plus les économies sont importantes pour le système de santé. En revanche, prendre en charge les personnes quand leur état de santé est largement détérioré, c’est faire porter tout l’effort de soins aux hôpitaux, les emboliser, accroitre leur pénurie de personnel et leurs difficultés financières.
Nous continuerons dans les mois à venir à apporter notre expertise pour que la mise en œuvre de la nouvelle version du titre de séjour pour soins soit la moins impactante possible pour les personnes que nous accompagnons. Notre mobilisation se poursuivra afin d’éviter que l’Aide Médicale d’Etat ne soit pas également, détricotée. Fort.e.s de notre expertise d’acteur.ice.s de terrain et des nombreuses études scientifiques, nous continuerons de montrer qu’il s’agit d’une dépense nécessaire, maitrisée et d’un dispositif de santé opérant. Nous espérons que nos responsables politiques saurons cette fois-ci se saisir de ces évidences scientifiques.
Pour conclure, nous sommes solidaires de l’ensemble des acteur.rice.s de la solidarité, qui se sont mobilisé.es pour l’accès aux droits pour tous.te.s : les discriminations engendrées par le texte voté hier soir, les mesures de répression sur les droits fondamentaux des populations ciblées vont entraver les progrès de soins et de prévention du VIH. C’est le message porté depuis plusieurs années par l’ONUSIDA, il est encore plus vrai au lendemain de ce vote.
Le collectif « 10 Choix Politiques pour en finir avec le sida » rassemble sociétés savantes, clinicien.ne.s, psychologues, infirmier.e.s, chercheur.euse.s, associations, centres de santé ; sa diversité ancre sa vision de la fin du sida dans une vision multidimensionnelle. C’est dans cette approche, fondée sur la science, les savoirs expérientiels et les droits fondamentaux de la personne que nous abordons ce sujet.
Contact
Anne Monnet Hoël
Coordinatrice du COREVIH arc alpin, qui assure la coordination du collectif | enfiniraveclesida@gmail.com