L’Actu vue par Remaides : « Carte Vitale obligatoire en pharmacie : une décision qui met en péril l’accès et la continuité des soins des plus vulnérables », dénonce la Fédération Addiction
- Actualité
- 13.08.2025
Crédit photo : CNIL. DR.
Par Jean-François Laforgerie
"Carte vitale obligatoire en pharmacie : une décision qui met en péril l'accès et la continuité des soins des plus vulnérables", dénonce la Fédération Addiction
Depuis l’annonce le 17 juin 2025 de l’obligation de présenter une carte Vitale pour obtenir certains médicaments, les professionnels-les de l’addiction et les médecins généralistes constatent sur le terrain de nombreuses ruptures de soins. Cette situation est dénoncée par la Fédération Addiction qui alerte sur les conséquences de cette mesure « prise sans concertation » qui « prive de traitement des personnes déjà en grande vulnérabilité ».
Rappel des faits
Dans son communiqué, la Fédération Addiction indique qu’en date du 17 juin, « l’Assurance Maladie et le ministère du Travail, de la Santé, des Solidarités et des Familles ont annoncé que la présentation de la carte Vitale deviendrait obligatoire pour bénéficier du tiers-payant en pharmacie lors de la délivrance de certains médicaments « sensibles » ( dont la méthadone souvent utilisée dans le traitement de substitution aux opiacés (TSO)et le méthylphénidate, prescrit pour le trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) chez l’enfant, l’adolescent et l’adulte.) ainsi que des médicaments onéreux (plus de 300 € la boîte). »
Cette mesure est déjà en application. La Fédération Addiction note que « malheureusement » cette décision a été prise « sans tenir compte de la réalité vécue par les usagers les plus fragiles ». « Elle place des milliers de personnes en situation de rupture de soins », alerte l’ONG.
Pourquoi cette décision a-t-elle été prise ?
L’Assurance Maladie s’en explique dans une communication. « Face à un nombre important de fraudes et de détournements de médicaments, l'Assurance maladie renforce les conditions d'utilisation de la carte Vitale », explique-t-elle. « En accord avec les syndicats de pharmaciens [mais pas les associations d’usagers-ères, ndlr], l'Assurance maladie rend désormais obligatoire la présentation de la carte Vitale (physique ou numérique) pour les personnes bénéficiant du tiers-payant. Si vous ne présentez pas votre carte Vitale, il vous faudra avancer les frais relatifs aux médicaments prescrits », explique l’Assurance Maladie. « Cette mesure vise notamment les médicaments "sensibles" (stupéfiants, certains antidiabétiques, certains traitements coûteux). Une délivrance sans carte Vitale sera possible uniquement dans des situations exceptionnelles, pour des nourrissons de moins de trois mois ou pour des personnes âgées en Ehpad, par exemple. » Les personnes bénéficiant de l'aide médicale de l'État (AME) sont aussi tenues de présenter leur carte AME.
Sur le site Ameli, Catherine Vautrin, ministre du Travail, de la Santé, des Solidarités et des Familles se fend d’ailleurs d’une explication : « Se soigner, c’est aussi agir avec responsabilité. Chacun a un rôle à jouer dans la préservation de notre système de santé. Présenter sa carte Vitale en pharmacie, c’est un geste simple mais essentiel pour un accès équitable, rapide et sécurisé aux soins et pour lutter fermement contre les abus ».
Qu’est-ce qui pose problème ?
Depuis plusieurs semaines, les adhérents-es de la Fédération Addictions (médecins, soignants-es, travailleurs-ses sociaux-les, etc.) signalent une multiplication des ruptures de traitement : des personnes usagères ne peuvent plus obtenir leurs médicaments en pharmacie, faute de carte Vitale. « Ces personnes, souvent suivies en CSAPA (centres de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie) ou par des médecins généralistes, cumulent les difficultés : précarité, isolement social, troubles de la santé mentale, perte de droits, absence de logement ou accès très limité au numérique. La perte ou l’absence de carte Vitale est fréquente et les démarches pour en obtenir une nouvelle sont complexes et longues », souligne l’ONG.
Quelles sont les conséquences ?
Cette nouvelle « obligation » conditionne l’accès aux traitements à la carte Vitale. Pour la Fédération Addiction : « Le gouvernement et l’Assurance Maladie prennent le risque de provoquer des rechutes, des hospitalisations, voire des surdoses. Des situations contradictoires avec le souci d’économies affiché ainsi qu’avec l’impératif de prévenir les ruptures de soins. » Et l’ONG d’expliquer : « Ce dispositif, appliqué sans discernement, revient à exclure du soin les personnes les plus vulnérables : c’est un refus de soin inacceptable, contraire à l’éthique médicale et aux principes de santé publique. »
La Fédération Addiction a écrit aux autorités en demandant que les personnes accompagnées en addictologie, par un CSAPA ou un médecin de ville, puissent bénéficier d’une dérogation claire et systématique. « Ces situations doivent être reconnues comme des exceptions, permettant l’accès aux traitements sans carte Vitale, dans le cadre d’un suivi médical et social régulier », défend l’ONG.
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