Journée internationale du préservatif interne
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Le 16 septembre, c’est donc LE jour de promotion de cet outil de prévention qu’il n’est pas interdit d’utiliser tout au long de l’année. Loin des clichés, reparler du fémidom, c’est aussi le moyen de casser le mythe de la capote unique : celle pour les hommes. Il y a bien deux types de préservatifs : un externe, qui ne doit pas dissimuler l'intérêt que représente la capote interne dite "préservatif féminin" notamment pour les femmes, mais aussi plus largement pour toutes les personnes ayant des rapports vaginaux ou anaux, y compris des hommes, des personnes trans, quels que soient leurs identités et pratiques. Des qualités méconnues, une inclusivité bien plus large que celle de "l’étui pénien" de latex et pourtant, le fémidom reste très peu utilisé.
En comparaison, on distribue bien plus de capotes externes qu’internes, y compris dans les associations. Des associations se sont d’ailleurs positionnées pour changer le discours sexiste de la prévention. En 2012, l’association de personnes trans, OUTrans disait : "En continuant de les qualifier de préservatifs féminins, nous pensons que nous reproduisons l’idée selon laquelle la personne pénétrée est du sexe féminin. Changer le langage de la prévention, c’est aussi donc déjà changer cette association hétérosexiste entre féminité et pénétration". Ces questions lexicales expliquent aussi la mauvaise connaissance ou le rejet d’un outil qui pourtant est beaucoup plus versatile qu’il n’y parait. A l’occasion de cette journée du préservatif interne, les associations de lutte contre le sida comptent reparler de cet outil, pour qu’il soit mieux aimé et donc mieux utilisé par celles et ceux qui en ont besoin.
Un peu d’histoire et de technique
Le préservatif féminin, aussi connu sous le nom de "Female Condom" ou encore "Fémidom" existe depuis 1998. C’est la véritable alternative au préservatif masculin. Son intérêt est qu’il est l’unique moyen de contraception entièrement contrôlé par les femmes. Il est aussi efficace que la capote, il ressemble à une gaine dotée de deux anneaux à ses extrémités. Le premier anneau (plus petit) se place à l’intérieur du vagin tandis que le second prend place à l’extérieur. En polyuréthane, il est hypoallergénique, contrairement au latex. On peut en outre l’utiliser avec n’importe quel lubrifiant à base d'eau ou de silicone. La dernière génération de fémidom est en nitrile, un composant hypoallergénique lui aussi. Le fémidom peut s’utiliser en présence d’un stérilet.
Un outil adapté aux besoins de prévention des femmes
Pour des raisons à la fois biologiques et culturelles, les femmes sont plus exposées au VIH et aux infections sexuellement transmissibles que les hommes. En France, elles représentent actuellement 32 % des nouvelles découvertes de séropositivité et la très grande majorité d’entre elles est infectée lors de relations hétérosexuelles (données de l’Institut de veille sanitaire de 2011). Le fémidom constitue une bonne alternative à la capote pour toutes les femmes, mais aussi pour les hommes !
Des avantages multiples
Le fémidom est un préservatif interne qui recouvre les muqueuses vaginales et/ou anales lors d’une pénétration et qui ne manque pas d’avantages. Pour les femmes, il permet d’être autonome en matière de prévention. De ce fait, il représente un enjeu pour l’égalité entre les hommes et les femmes a fortiori dans la sexualité, domaine encore très marqué par une distribution inégalitaire des rôles…
Il permet de diversifier l’offre des outils de prévention, par exemple chez les couples séro-différents (l’un des partenaires est séropositif, l’autre pas).
Plus de confort pour l’homme : contrairement à la capote, il ne compresse pas le pénis, limite les troubles de l’érection que la pose de la capote peut occasionner, etc.
Plus de confort pour la femme : très lubrifié, il pallie les conséquences des sécheresses vaginales qui concernent de nombreuses femmes.
Plus de plaisir pour les deux : les préservatifs féminins sont en polyuréthane, un matériau non allergisant, lisse, doux, qui se réchauffe à la température du corps et qui se ferait presque oublier !
Enfin, un truc tout bête, mais qui fait une sacrée différence avec la capote, c’est que le préservatif féminin peut être placé plusieurs heures avant le rapport.
Ça, c’est du vécu
"Je connais une dame qui vient nous voir au local de AIDES, à Paris, dans le VIIIème arrondissement, qui utilise le préservatif féminin. Elle nous a expliqué en être arrivé là parce que son compagnon perdait son érection avec le préservatif masculin. Lorsqu'elle était venue me soumettre son problème, je lui ai parlé de la possibilité de poser son préservatif en avance. Ce qu'elle a fait, et selon ses dires ça marche !", explique Nicole, militante de AIDES.
Charlotte, également militante à AIDES, vit à Marseille et utilise ce moyen de prévention."Le préservatif interne est un outil très chouette pour moi, je l'utilise, et j'en fait la promotion. On peut le mettre avant, il est plus lubrifié qu'une capote externe, la personne qui pénètre n'est pas obligée de se retirer à la fin, pas de latex, on peut arrêter et recommencer sans avoir à changer d'outil, pas de problème de taille, etc. Bref, je ne vois presque aucun inconvénient et bien des avantages par rapport au préservatif externe, explique Charlotte. Il peut paraître un peu impressionnant. C'est sûr que si on le montre en le tenant du bout des doigts, il ne fera pas très envie... mais en le présentant comme quelque chose qui doit être inséré qui peut être sujet à découverte et à jeux, comme une nouveauté à essayer entre deux personnes consentantes, l'impression peut changer de bord ! D'ailleurs, on l'a rebaptisé interne parce qu'il s'adapte autant à un vagin qu'à un anus, il n'y a donc pas de genre pour l'essayer". Militant à Toulouse, Michel a rencontré dans un bar maquis un jeune homme d'origine africaine qui a l'habitude de prendre le préservatif interne alors que ses amis prennent l'externe. ''Plusieurs fois, j'ai essayé le préservatif masculin. A chaque fois cela me fait débander. Et je perds le plaisir. Une fois, ma copine a mis le préservatif interne, et là je me suis senti libre. Depuis que j'ai essayé le préservatif interne avec ma copine, je ne veux plus lâcher. Et c'est pour cette raison que je le prends toujours maintenant", a expliqué le jeune à Michel.
"Dans le cadre de ma pratique professionnelle, je le distribue facilement aux femmes que je rencontre depuis que j'ai entendu l'argument ultime : LE CLITORIS, explique Ludovic, militant à Metz. Une utilisatrice m'a expliqué qu'elle avait plus de plaisir avec cet objet grâce à l'anneau extérieur qui aurait tendance à titiller le clitoris. Quand j’en parle à d’autres personnes, j'explique également qu'il permet aux femmes de pouvoir se protéger des IST et VIH lorsque l'homme refuse de se protéger au moyen de la capote. La femme gagne en indépendance vis-à-vis de sa santé. Et je note que l’argument de la pose à l'avance de l'objet lors d'une soirée bien arrosée fonctionnement bien aussi."
Allons y Messieurs !
"Pour pouvoir en parler sur les actions j'ai voulu l'essayer afin de faire un retour objectif et en connaissance de cause, indique Romain , militant de AIDES à Rennes
Lors de l'utilisation, j'ai pu constater que en tant qu' "actif", le plaisir des sensations était retrouvé par rapport au préservatif externe et ce pour plusieurs raisons. Il procure des sensations qui rejoignent presque le rapport sans préservatif pour la simple raison que le préservatif externe ne reste pas sur le sexe amenant des sensations lors de la pénétration (va-et vient qu'on ne ressent pas forcément avec le préservatif externe). On peut remettre du gel sans le risque de voir la capote "s'échapper". Il y a le confort non négligeable de pouvoir éjaculer sans risque de contamination ou de perte de préservatif. C’est un outil de prévention sans latex, intéressant pour les personnes qui y sont allergiques. Lors de son utilisation en tant que "passif", et à l'inverse des arguments précédents, la sensation de plaisir peut être moindre du fait qu'on ressent moins les pénétrations (le préservatif restant en interne). Il y a un gros point positif dans ce contexte "passif", la texture même du fémidon est plus agréable lors des rapports et notamment avec l'utilisation de sex-toys. Les préservatifs masculins peuvent ne pas aller sur certains sextoys, le fémidon est un bon compromis. La finesse du préservatif masculin peut faire ressentir certaines aspérités de certains accessoires, le fémidon évite les sensations désagréables. Et puis, c’est confortable quand on a besoin de capote XXL et qu'on en a pas. Je connais des personnes qui n'utilisaient plus de capote car ça les faisait débander. Elles ont essayé le fémidon et sont revenues ensuite vers moi pour en avoir à nouveau. J’incite régulièrement les personnes qui ne le connaissent pas à l'essayer".
"Dans le cadre de l'essai IPERGAY, nous avons tenu à disposition constante et distribué de nombreux préservatifs internes aux hommes gays et bisexuels qui bénéficiaient de l'accompagnement communautaire à l'usage de PrEP (prophylaxie pré exposition), explique Stéphane, militant à Paris et ancien accompagnateur de l’essai IPERGAY. Nous avions des retours d’utilisateurs. "Pour certains, c’était super pour l'utilisation sur des lieux de rencontre extérieurs, aussi bien mis à l'avance, ou très rapide à mettre dans le feu de l'action. Le partenaire actif l'enfile en même temps qu'il pénètre (en ayant préalablement retiré l'anneau interne). La lubrification importante grâce au silicone est un vrai facilitateur pour les pénétrations anales. Il procure beaucoup plus de sensations pour le mec actif qui retrouve plus de sensation de friction et de glissement qu'avec le préservatif externe. Il est très facilitant pour le mec passif afin de ne pas avoir à tergiverser avec ses partenaires actifs pour qu'ils mettent un préservatif externe", explique Stéphane, qui indique l’avoir beaucoup proposé juste pour qu’il soit essayé car peu de mecs l'avaient préalablement utilisé.
Comme on voit, le fémidom est bien loin des idées reçues qu’il se trimballe depuis sa création en 1998. Il y a tout intérêt à l’essayer (manifestement, on a de bonnes surprises), à le faire connaître autour de soir… Reste deux problèmes : son prix qui reste trop élevé encore, mais les associations en distribuent et le peu de communication qui est fait à son propos. De ce point de vue, la journée du 16 septembre est un rappel utile… mais sans doute pas suffisant.