L'Actu vue par Remaides : LGBTphobies… des crispations dans le monde
- Actualité
- 09.09.2024
© Cédric Daniel
Par Jean-François Laforgerie et Fred Lebreton
LGBTphobies... des crispations dans le monde
Ces dernières semaines ont davantage donné lieu à des crispations LGBTphobes qu’à des avancées en matière d’égalité des droits. Ainsi, à l’instar de ce qui a été fait en Russie ou en Hongrie, la Bulgarie a jugé bon de se doter une loi anti-« propagande » LGBT+ à l’école. Conséquence, l’Onu lui a demandé de revenir sur ce texte décrié à l’international. De son côté, le Burkina Faso a indiqué son souhait d’interdire l'homosexualité. Transphobie aussi chez Elon Musk qui s’oppose durement contre les lois favorables aux élèves transgenres dans certains États américains. En Europe, cette fois, des parlementaires ont pris l’initiative de lancer une nouvelle pétition contre les « thérapies de conversion » qui sévissent encore, y compris dans des pays où elles sont pourtant interdites. La rédaction de Remaides fait le point sur l’actu LGBT+
L’ONU appelle la Bulgarie à revenir sur sa loi anti-« propagande » LGBT+ à l’école
Les Nations unies ont appelé vendredi 16 août la Bulgarie à « réexaminer » une récente loi visant à contrer la supposée « propagande » LGBT+ à l’école, estimant notamment que ce texte allait à l’encontre des « engagements internationaux » de ce pays qui est membre de l’UE. « Nous sommes profondément préoccupés par l’adoption d’un amendement législatif en Bulgarie interdisant toute discussion sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre dans les écoles et appelons urgemment à ce que qu’il soit réexaminé en tenant compte des obligations internationales du pays », a déclaré Elizabeth Throssell, porte-parole du Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’homme, dans un communiqué, cité par l’AFP. Le 15 août, le président bulgare, Roumen Radev, avait ratifié ce texte inspiré de lois en Hongrie et en Russie et interdisant aux écoles « d’encourager » l’orientation sexuelle « non-traditionnelle » et l’identité de genre « différente de la biologique ». Le chef de l’État bulgare, proche de Moscou, a ainsi fait fi des appels de différentes organisations non gouvernementales mais aussi du Conseil de l’Europe à faire jouer son droit de veto afin d’éviter l’entrée en vigueur du texte. Dans son communiqué, l’ONU estime que ce texte « va à l’encontre des garanties constitutionnelles en Bulgarie et des engagements issus de traités internationaux sur les droits humains à assurer l’égalité, la non-discrimination et la liberté d’expression ». Ancien pays communiste animé d’un très large sentiment hostile aux LGBT+, la Bulgarie n’autorise ni le mariage ni l’union civile entre personnes de même sexe. Le pays est par ailleurs en proie à une forte instabilité politique et organisera des élections cet automne pour la septième fois depuis 2021, indique l’AFP.
UE : Pétition contre les « thérapies de conversion »
En Juin dernier, les élections européennes ont confirmé un Parlement assez stable dans sa représentation, mais avec tout de même un renforcement des droites conservatrices et extrêmes. En mars 2018, pour la première fois, le Parlement européen avait appelé ces États membres, dans le cadre d'une résolution, à interdire à l'échelle nationale les pratiques visant à modifier l'orientation sexuelle ou l'identité de genre des personnes, connues sous le nom de « thérapies de conversion ». À cette période, 435 eurodéputés-es avaient voté pour, 109 contre, 70 s'étaient abstenus-es. Dans la délégation française, 34 élus-es d'extrême droite, de la droite conservatrice et du centre s'étaient abstenus-es ou avaient voté contre l'amendement en question (dont Rachida Dati et Nadine Morano, pour ne citer qu’elles). Aujourd’hui, le conseil de l'Union européen est présidé jusqu'au 31 décembre 2024 par la Hongrie de Victor Orban, un des pays les plus LGBTphobes de l'UE. Il s'en suivra six mois de présidence de la Pologne avec un nouveau gouvernement de centre droit (Donald Tusk). En France, juste après les élections européennes du 9 juin, le RN de Jordan Bardella a surpris tout le monde en annonçant rejoindre le groupe de Victor Orban à Bruxelles. Le président du RN a pris la tête d’un nouveau groupe au Parlement européen : « Patriotes pour l’Europe » qui sera le troisième en nombre d’eurodéputés-es : ce groupe compte douze partis souverainistes ou d’extrême droite. Dans ce contexte, il est donc important de signer cette pétition pour demander l'interdiction des « thérapies de conversion ». Tout est expliqué en détails dans ce lien :
Pour aboutir, une initiative citoyenne européenne doit recueillir un million de signatures et atteindre des seuils minimums dans au moins sept pays de l’UE. La date butoir pour prendre connaissance du texte et signer la pétition est le 17 mai 2025, une date symbolique.
Le Burkina Faso veut interdire l'homosexualité
Le gouvernement du Burkina Faso, pays sahélien dirigé par un régime militaire suite à un coup d’État, il y a quelques mois, a récemment adopté en conseil des ministres un projet de loi qui prévoit notamment d'interdire l'homosexualité, selon un compte-rendu officiel cité par l'AFP. Le Conseil a adopté un décret pour un nouveau Code des personnes et de la famille (CPF) qui « consacre l'interdiction de l'homosexualité », dans le pays, précise la présidence dans un communiqué. « Dorénavant l’homosexualité et les pratiques assimilées sont interdites et sont punies par la loi », a souligné le ministre de la Justice, Edasso Rodrigue Bayala. Les peines encourues n'ont pas été précisées et le texte doit encore être adopté par les députés-es de l'Assemblée législative de transition (ALT). Jusqu'à présent, aucune loi ne pénalisait l'homosexualité au Burkina Faso. En août, le Conseil supérieur de la communication, l'organe régulant les médias, avait décidé « d'interdire de diffusion les chaînes de télévision faisant la promotion de l'homosexualité ». Sur le continent africain, l'homosexualité est criminalisée dans une trentaine de pays et certains ont récemment durci leurs lois, comme le Ghana ou l'Ouganda. Le capitaine Ibrahim Traoré, au pouvoir au Burkina Faso depuis son coup d'État en septembre 2022 a fait de la « souveraineté » de son pays la ligne directrice de sa gouvernance. Enfin, tout est relatif puisque le ministère russe de la Défense qui a repris en main les activités du Groupe Wagner en Afrique vient d’envoyer des paramilitaires, la Brigade Bear, dans le pays où il construit d’ailleurs une première base militaire russe.
Loi favorable aux élèves transgenres : Elon Musk se crispe
Transphobie ? Elon Musk a annoncé (16 juillet) sur X (ex-Twitter) qu’il allait déplacer au Texas le siège de l’entreprise aérospatiale SpaceX et du réseau social X (ex-Twitter), en signe de protestation au passage d’une loi sur les élèves transgenres, promulguée lundi 15 juillet en Californie, explique l’AFP. « C’est la goutte d’eau », a écrit l’entrepreneur, justifiant sa décision par le passage de ce texte « et de beaucoup d’autres qui l’ont précédé » et qui « attaquent les familles et les entreprises ». Le texte, promulgué mi-juillet par le gouverneur de Californie Gavin Newsom, vise à protéger les droits des élèves transgenres et lutter contre la discrimination. Il interdit, notamment, au personnel scolaire de divulguer à qui que ce soit des informations sur l’orientation sexuelle ou l’identité de genre d’un-e élève sans le consentement préalable de la personne concernée. Cette interdiction concerne également les parents de l’élève. « Il y a un an, j’ai expliqué clairement au gouverneur Newsom que les lois de cette nature allaient forcer les familles et les entreprises à quitter la Californie pour protéger leurs enfants », a expliqué Elon Musk. Le siège de SpaceX est actuellement situé à Hawthorne, et celui de X à San Francisco. Le réseau social X va être réimplanté à Austin, où se trouve déjà le siège de Tesla, qui avait été déménagé de Californie, en 2021. À l’époque, Elon Musk avait évoqué, pour justifier sa décision, la législation californienne et les mesures de prévention prises lors de la pandémie de Covid-19 par Gavin Newsom.
Cameroun : le coming out de la fille du président fait réagir
La récente révélation de l’homosexualité de Brenda Biya, fille du président camerounais Paul Biya, a suscité de vives réactions dans son pays où l’homophobie reste profondément ancrée, indique l’AFP. Dans un acte de défiance, vis-a-vis de son pays natal qui réprime pénalement l’homosexualité, la jeune femme a publié le 30 juin, dernier jour du mois des Fiertés, une photo d’elle et de sa compagne, une mannequin brésilienne, en train de s’embrasser, enveloppées dans la traine flamboyante de leurs manteaux de fourrures. « Je suis folle de toi et je veux que le monde le sache », légendait la jeune fille de 26 ans, qui vit à Genève. Depuis, Brenda Biya fait face à une plainte auprès du procureur de Yaoundé pour « incitation à la pratique de l’homosexualité » déposée par une association qui revendique 5 000 membres et milite contre la dépénalisation de l’homosexualité. Au Cameroun, les rapports sexuels entre personnes du même sexe sont illégaux et passibles de peines allant de six mois à cinq ans d’emprisonnement. L’ONG Human Rights Watch avait dénoncé en 2022 les « violences et abus » dont sont régulièrement victimes les personnes LGBT+ dans ce pays d’Afrique centrale. « J’ai reçu beaucoup de commentaires négatifs (...) des insultes, j’ai aussi reçu beaucoup de soutien de communautés LGBTQ, et d’organisations ou de gens qui ne se sentaient pas représentés au Cameroun », a expliqué Brenda Biya. Au palais présidentiel, il n’y a eu aucune réaction officielle de son président de père, 91 ans, au pouvoir depuis bientôt 45 ans. Pour Alice Nkom, avocate camerounaise spécialisée dans la défense des personnes LGBT+, Brenda Biya « a pris le risque d’affronter son père et son président, et a brisé les chaînes de tout ça ». « C’est une question de droits de l’Homme, donc tout le monde doit être autour de Brenda pour amplifier son message », a ajouté l’avocate.