L'Actu vue par Remaides : Vaccination Mpox : Pour qui ? Où ? Combien de doses ?
- Actualité
- 22.08.2024
© Studio Capuche
Par Fred Lebreton
Vaccination Mpox : Pour qui ? Où ? Combien de doses ?
Depuis que l’OMS a déclenché son niveau d’alerte le plus élevé à la suite d’une résurgence du Mpox (lire notre article), de nombreuses personnes se posent des questions sur la vaccination. Suis-je éligible ? Où me faire vacciner ? Combien de doses ? La rédaction de Remaides fait le point.
Ne cédons pas à la panique générale !
Tous-tes les experts-es le disent. La situation n’est, aujourd’hui, pas inquiétante en France. Le risque d’infection par un virus Mpox de clade I pour la population européenne est considéré, à ce jour, comme faible par le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC). Néanmoins, une vigilance et des stratégies de réponse se mettent en place. Des réunions se multiplient depuis plusieurs jours entre les autorités de santé (Direction générale de la Santé) et les associations communautaires de santé (Médecins du Monde, Actions Traitements, AIDES, etc.) afin de mettre en place une stratégie efficace. Le virus du Mpox est connu et une stratégie de réponse efficace a été établie en 2022 (prévention, diagnostic rapide, prise en charge des cas, vaccination, etc.) grâce à la pression des associations. Nous ne partons pas de rien. Souvent présenté comme un clade plus « dangereux » que le clade II, aucune donnée scientifique solide ne nous permet de dire aujourd’hui que le clade Ib est plus mortel, transmissible ou sévère (voir encart ci-dessous).
« On ne s’attend pas à une épidémie en Europe comparable à la Covid »
La Pre Brigitte Autran, présidente du Comité français de veille et d'anticipation des risques sanitaires (Covars) s’est montrée rassurante lors d’une interview sur France Info jeudi 22 août : « Il est vraisemblable que l’on va connaître la même situation qu’en Suède [où un cas de clade 1 a été détecté, ndlr]. On s’attend tous à des cas importés et sporadiques de [la nouvelle souche de] Mpox en France, mais un dispositif est en place pour les détecter et les prendre en charge ». La spécialiste en immunologie insiste sur l’importante de ne pas comparer le Mpox avec la Covid. Ce sont des virus, différents et des modes de transmission différents : « On ne s’attend pas à une épidémie en Europe comparable à la Covid », souligne Brigitte Autran. La présidente du Covars revient sur la vaccination Mpox : « On a la chance d’avoir des vaccins (…). La Haute Autorité de Santé est en train de revoir les indications vaccinales et voir s’il faut les étendre. Il n’y a aucune raison de lancer une vaccination dans la population générale ». Et Brigitte Autran de conclure : « Les hôpitaux sont prêts à recevoir les malades ». Pourvu qu’elle ait raison.
Mpox : l’importance du contexte écologique et social
Dans une interview accordée à Médiapart le 16 août dernier, Camille Besombes, médecin infectiologue et épidémiologiste, revenait sur l’importance de tenir compte des facteurs socioéconomiques et environnementaux : « Pour cette épidémie, il est intéressant de s’attarder sur le contexte écologique et social. Le Kivu [région et ancienne province de l'Est de la République démocratique du Congo (RDC), ndlr], est une zone de guerre civile depuis 2004, avec d’importants déplacements de population et des camps de réfugiés. Les médecins et agents de santé ont des difficultés pour mener des campagnes de vaccination. L’accès aux soins est très faible. D’autre part, ces zones sont caractérisées par une grande pauvreté, ce qui peut favoriser la consommation de petits rongeurs en l’absence d’autres sources alimentaires, et une éventuelle transmission zoonotique [de l’animal à l’homme, ndlr] pour le cas index. Source de revenus, la prostitution est également en forte augmentation et multiplie les contacts, et donc les risques de transmission. La malnutrition favorise également les formes graves de la maladie. Tout cela favorise les émergences d’épidémies telles que le Mpox ».
Camille Besombes explique également le concept d’environnement pathogène : « Lorsque le Kivu est confronté à deux épidémies, une d’Ebola en 2018, l’autre de Mpox en 2024, cela doit poser des questions sur le rôle de ce socio-écosystème spécifique dans ces deux émergences : quelles pratiques, quel rapport à l’environnement, quelles relations avec les non-humains ont favorisé ces deux émergences ? Cela illustre que ce sont ces évolutions des environnements écologiques et sociaux qui posent problème, qui sont devenus « pathogènes ». D’où l'importance d’agir depuis ces écosystèmes, en promouvant une « immunité écologique » pour prévenir les émergences infectieuses »
Quel vaccin ?
La vaccination Mpox repose sur l’utilisation du vaccin MVA (Modified Vaccine Ankara) produit par la firme pharmaceutique Bavarian Nordic au Danemark. Bien que produit peu avant l'annonce de l'éradication de la variole, le vaccin MVA a pu être utilisé comme vaccin antivariolique, ayant été homologué en Bavière en 1977. Ce vaccin est actuellement disponible sous différents noms en fonction de la région ou du pays où il est disponible (Imvanex en Europe ; Imvamune au Canada et Jynneos aux États-Unis). MVA (Modified Vaccine Ankara) est une souche atténuée du virus de la vaccine. Les vaccins de troisième génération sont réalisés à partir de virus vaccinaux atténués qui sont beaucoup moins virulents et entraînent moins d'effets indésirables. Le vaccin n’empêche pas la transmission mais il permet à la fois de réduire les risques de transmission et les formes sévères du Mpox. L’essai ANRS DOXYVAC a montré que la vaccination était associée à une réduction de 99 % des risques d’infection à Mpox durant la période de l’été 2022. Les résultats de cette étude ont fait l’objet d’une publication dans la revue The Lancet Regional Health-Europe du 31 juillet 2024. Par ailleurs, lors de cette même épidémie en 2022, les décès survenus aux États-Unis ont concerné 100 % de personnes NON vaccinées. La vaccination pourra être réalisée par un médecin ou par un-e autre professionnel-le de santé sur prescription médicale.
Quelle efficacité sur la nouvelle souche ?
Qui dit virus émergent et nouvelle souche dit manque de recul. Il est donc trop tôt pour affirmer l’efficacité certaine du vaccin sur la souche 1b (ou clade 1b) du Mpox. Néanmoins, les experts-es s’accordent sur le fait que si le vaccin est efficace sur la souche « mère », il devrait l’être aussi sur ses différents variants. Dans un entretien accordé à Remaides en février dernier, le Pr Jean-Daniel Lelièvre, directeur de la recherche clinique à l'Institut de recherche vaccinale (VRI), se montrait rassurant : « Les souches de type I et II étant très proches, il n’est pas attendu de différences entre elles en termes d’efficacité après vaccination par le MVA »
Qui peut se faire vacciner ?
Pour l’instant, la vaccination contre le Mpox ne concerne pas la population générale, mais plutôt certaines communautés qui sont plus exposées à un risque de contracter ce virus. Le 8 juillet 2022, la HAS a recommandé de proposer aux populations cibles suivantes une vaccination en préexposition :
- Les hommes multipartenaires ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH) ;
- Les personnes trans rapportant des partenaires sexuels multiples ;
- Les travailleurs-ses du sexe ;
- Les professionnels-les des lieux de consommation sexuelle, quel que soit le statut de ces lieux ;
- Les femmes vivant un HSH.
Concernant la vaccination des enfants exposés au virus et susceptibles de développer une forme sévère de la maladie, la HAS a précisé le 16 juin 2022 qu’elle peut être envisagée au cas par cas, par les seuls-es spécialistes, après une évaluation stricte des bénéfices et des risques et avec le consentement des parents (ou du- de la représentant-e légal-e de l’enfant).
Où se faire vacciner ?
Le déploiement des centres de vaccination est coordonné au niveau régional par les Agences régionales de santé (ARS). L’ensemble du territoire métropolitain et ultramarin dispose d’un accès à un centre de vaccination. Les coordonnées de ces centres sont accessibles sur Santé.fr ou sur ce lien. Cette liste est actualisée régulièrement.
Combien de doses ?
- Une seule dose si vous avez fait le vaccin contre la variole dans votre enfance/jeunesse.
- Deux doses à 28 jours d’intervalle, si vous n’avez pas le vaccin contre la variole dans votre enfance/jeunesse.
- Trois doses pour les personnes immunodéprimées
« En France, la vaccination contre la variole était obligatoire jusqu'en 1979 et la maladie a été déclarée comme éradiquée en 1980, grâce à une campagne de l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Vous pouvez vérifier cette vaccination dans votre carnet de santé, mais dans le doute, il n'y a pas de problème à faire les deux doses de vaccination », expliquait le Pr Jean-Daniel Lelièvre, dans un entretien à Remaides en février dernier.
Important : Vivre avec le VIH ne remet pas en cause l’indication vaccinale. Pour les personnes vivant avec un VIH non contrôlé (CD4 inférieurs à 200/mm3) et présentant une immunodéficience, le nombre de doses recommandé peut être supérieur au nombre de doses habituel (à confirmer avec votre infectiologue). La vaccination ne confère pas une protection immédiate. Aussi, il est important de continuer à éviter tout contact exposant à un risque avec une personne infectée par le virus Mpox ou suspectée de l’être. Par ailleurs, il est important de rappeler que quelle que soit l’efficacité du vaccin après une ou deux doses, celle-ci ne sera jamais de 100 %. La prévention doit être combinée.
Quid d’une dose de rappel ?
- Dose de rappel possible si votre schéma vaccinal de 2022/2023 n’est pas complet.
- Pas de dose de rappel (pour l’instant), si vous avez contracté le Mpox en 2022/2023. En effet, l’immunité naturelle conférée par l’infection rend inutile la vaccination.
- Pas de dose de rappel (pour l’instant) si votre schéma vaccinal complet a été effectué en 2022/2023.
Dans son entretien avec Remaides, le Pr Jean-Daniel Lelièvre plaidait pour une dose de rappel du vaccin Mpox : « Nous savons qu'après deux ans, il y a une perte de l'efficacité vaccinale. Une ou deux doses, ce n’est pas suffisant. Il faut faire au moins trois doses ». Les recommandations vaccinales contre le Mpox sont actuellement réévaluées par la HAS. L’avis de la HAS sera rendu fin aout. Il n’est pas impossible qu’une dose de rappel soit recommandée aux personnes vaccinées en 2022/2023. À suivre…
S'informer, se vacciner, se soutenir
Pour toute information sur le Mpox, vous pouvez contacter le numéro du « Mpox info service » (08 01 90 80 69), service téléphonique d’information gratuit « ouvert tous les jours de 8 heures à 23 heures ».
AIDES a mis en ligne une page intitulée « Mpox : 10 informations pour réduire les risques ».
Act Up-Paris a aussi mis en ligne une page très complète.
Les coordonnées des lieux de vaccination et modalités de prise de rendez-vous sont disponibles sur les sites internet des agences régionales de santé (ARS) de votre région, ou en cliquant sur ce lien.
Un groupe d’auto-support a été créé par un volontaire de AIDES sur l'app Telegram (non anonyme sauf si on cache son numéro et met un pseudo) accessible en cliquant sur ce lien.
"Risque faible" aux Etats-Unis mais vigilance
Dans un article très complet publié le 18 août sur le site américain NBC News, le journaliste américain Benjamin Ryan a demandé à plusieurs experts-es américains-es si la nouvelle souche de Mpox (clade 1b) constituait une réelle menace aux États-Unis. Pour l’instant, les experts-es se montrent rassurants-es. La Dre Anne Rimoin, épidémiologiste à l'Université de Californie à Los Angeles et experte du Mpox, a déclaré que le contexte est essentiel lorsqu'on considère comment le Mpox pourrait se comporter dans les pays occidentaux par rapport à l'Afrique : « Je pense que nous devons être très, très prudents avant de dire que cette souche est plus dangereuse. Les données sur la gravité, la mortalité associée — tout cela est limité. Il y a beaucoup de questions sur la possibilité que la gravité perçue soit davantage liée à la population dans laquelle elle se propage, à leur système immunitaire, à la voie de transmission ou à la dose infectieuse », explique l’experte. De son côté, le Dr Dan Barouch, virologue à la Harvard Medical School, a déclaré qu'il était probable que des cas de clade I apparaissent aux États-Unis. « Le risque absolu aux États-Unis est actuellement faible », a-t-il affirmé. « Cependant, nous devons rester vigilants ». La promiscuité semble être un autre facteur de risque selon Jennifer H. McQuiston qui travaille au ministère de la Santé et des Services sociaux des États-Unis : « Les gens en RDC ont tendance à vivre dans des conditions beaucoup plus exiguës qu'aux États-Unis. Nous n'entendons pas parler de cas de personnes l'attrapant au marché. La transmission au sein des ménages pourrait se produire en RDC parce que les membres de la famille s'occupent des malades sans pouvoir se protéger et avec moins de moyens pour isoler les personnes infectées ». Rappelons tout de même que les États-Unis, première puissance économique au monde, ont un système de santé profondément inégalitaire. Lors de l’épidémie de Mpox en 2022 (clade 2), des décès sont survenus majoritairement chez des hommes noirs, gays, non vaccinés contre le Mpox, séropositifs au VIH mais non traités et en stade sida (lire à ce sujet cet article de Liz Highleyman pour le site Poz. ).