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    L’Actu vue par Remaides : « VIH, sciences, LGBT+ : les cibles se multiplient »

    • Actualité
    • 25.03.2025

     

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    DR.

    Par Jean-François Laforgerie

    VIH, sciences, LGBT+ :
    les attaques se multiplient

    Aux États-Unis, d’abord et surtout, mais aussi dans d’autres pays, comme la Hongrie, les personnes LGBT+ et tout particulièrement les personnes trans, les programmes de lutte contre le VIH qu’ils soient de prévention et d’accompagnement comme de recherche sont les cibles des gouvernements « illibéraux ». Ces attaques provoquent de très nombreux soubresauts. Explications.

    Des attaques contre la lutte contre le sida et l'aide au développement

    Pepfar : des organisations évangéliques demandent à Donald Trump d'épargner les programme de lutte contre le sida

    Le plan présidentiel d’urgence pour la lutte contre le sida (Pepfar) a été lancé en 2003 à l’initiative de George W. Bush. Ce plan dépend en grande partie du soutien logistique de l’Usaid (Agence américaine pour le développement international) « dont la plupart des projets ont été annulés » depuis l’annonce des coupes budgétaires par l’administration Trump. Ces coupes inquiètent quant à leur impact sur les programmes de lutte contre le VIH. Récemment, comme le rapporte Le Figaro (18 mars), plusieurs groupes évangéliques ont exhorté le chef d’État américain à « épargner le programme de lutte contre le VIH » de ces coupes budgétaires, a rapporté le journal britannique The Guardian. Pour Galen Carey, cité par Le Figaro, vice-président des relations gouvernementales à l’Association nationale des évangéliques (NAE), cette annonce est une douche froide : « Le Pepfar a été un programme très populaire (…) Nous encourageons l’administration à remettre le programme à plein régime dès que possible », ajoute Galen Carey. Directrice de la santé chez World Relief  ― branche humanitaire de l’Association nationale des évangéliques―, Emily Chambers Sharpe a commenté : « Ce traitement permet même d’empêcher la propagation du virus ». Les organisations chrétiennes américaines déplorent d’ailleurs une distribution de médicaments « quasiment au point mort » depuis l’annonce de la réduction des aides. « La chaîne d’approvisionnement du VIH dans son ensemble a été très gravement endommagée », a souligné Emily Chambers Sharpes, en contact avec les centres de santé implantés en Afrique.

    Justice : les actions de Musk concernant l'Usaid "probablement" inconstitutionnelles selon un juge

    Mauvaise passe. Un tribunal fédéral a jugé mardi 18 mars que les mesures prises par Elon Musk et sa commission à l’efficacité gouvernementale (Doge) en vue de la suppression de l’agence américaine de développement, l’Usaid, étaient « probablement » inconstitutionnelles. Ces actions « ont probablement violé la Constitution des États-Unis de multiples manières », a considéré un juge fédéral du Maryland, près de Washington, cité par l’AFP. Elles « ont privé les élus du peuple au Congrès de leur autorité constitutionnelle de décider si, quand et comment une agence créée par le Congrès doit être fermée », selon le texte de la décision. Le juge, saisi par 26 anciens-nes ou actuels-les employés-es de l’Usaid qui contestaient l’autorité d’Elon Musk sur cette agence fédérale, a, en conséquence, ordonné à Doge de rétablir l’accès aux courriers électroniques, paiements, et systèmes électroniques de tout le personnel de l’Usaid.
    Le président républicain Donald Trump a signé dès son arrivée au pouvoir le 20 janvier un décret ordonnant un gel de l’aide étrangère américaine pour 90 jours. Le gel de cette l’aide a suscité choc et émoi au sein de l’agence indépendante créée par une loi du Congrès américain en 1961, mais bien au-delà dans tous les pays bénéficiaires. L’Usaid gérait, avant la suspension décidée par Trump, un budget annuel de 42,8 milliards de dollars, représentant à lui seul 42 % de l’aide humanitaire déboursée dans le monde.

    Des "millions de vies" en danger après "les coupes brutales" dans les financements, selon le Haut-Commissaire aux réfugiés-es

    Drame. Des « millions de vies » sont en danger après « les coupes brutales » dans les financements, a averti jeudi 21 mars l’agence de l’ONU pour les réfugiés-es, ce qui va la forcer à supprimer des emplois faute de financement américain, indique l’AFP. Sans citer expressément la baisse drastique de l’aide étrangère des États-Unis, qui représente environ 40 % du budget de l’organisation, le Haut-Commissaire pour les réfugiés-es de l’ONU, Filippo Grandi, a averti que « les coupes budgétaires brutales dans le secteur humanitaire mettent en danger des millions de vies ». « Les conséquences pour les personnes fuyant le danger seront immédiates et dévastatrices », a-t-il prévenu dans une déclaration envoyée à la presse. « Avec moins de fonds, moins de personnel et une présence réduite du HCR dans les pays accueillant des réfugiés-es, l’équation est simple : des vies seront perdues », a-t-il insisté. Le HCR a également envoyé une communication interne à ses employés-es pour les informer de la situation et annoncer que l’organisation serait forcée de supprimer des emplois, a indiqué une source humanitaire à l’AFP. « Nous appelons les États membres à honorer leurs engagements envers les personnes déplacées. L’heure n’est plus au repli mais à la solidarité », a demandé Filippo Grandi, dont l’organisation comptait plus de 15 000 salariés-es en septembre 2024. Les États-Unis étaient jusqu’à présent le plus important donateur d’aide étrangère, de très loin. L’administration Trump a entrepris le quasi-démantèlement de l’agence américaine du développement Usaid, qui disposait d’un budget annuel de 42,8 milliards de dollars et représentait à elle seule 42 % de l’aide humanitaire déboursée dans le monde.

    Trump demande à la Cour suprême d'agir contr les juges qui s'opposent à lui

    Mauvais perdant. Nouvelle charge de Donald Trump contre l’institution judiciaire : le président américain a demandé jeudi 20 mars à la Cour suprême, la plus haute instance judiciaire du pays, de « régler » le « problème » constitué selon lui par les juges fédéraux qui ont bloqué certaines de ses décisions depuis son retour à la Maison Blanche. « Si le président [de la cour, ndlr] Roberts et la Cour suprême des États-Unis ne règlent pas immédiatement ce problème nocif et inédit, notre pays sera en très grave danger ! », a écrit le président américain sur son réseau Truth Social. Aux États-Unis, les litiges électoraux se règlent en dernier ressort devant la Cour suprême. « Ces juges veulent endosser les pouvoirs de la présidence, sans avoir à atteindre les 80 millions de votes. Ils veulent avoir tous les avantages, mais sans prendre de risques », a également critiqué le milliardaire républicain, accusé par ses opposants-es et de nombreux-ses experts-es de mettre à mal la séparation des pouvoirs aux États-Unis, et d’outrepasser ses droits. De nombreuses décisions prises par le président depuis son retour à la Maison Blanche le 20 janvier ― concernant notamment le droit du sol ou la présence de personnes transgenres dans l’armée ― ont été attaquées en justice et souvent suspendues par des magistrats-es estimant que le dirigeant outrepassait ses prérogatives.
    Six des neuf magistrats qui composent la Cour suprême sont des conservateurs.
    Tout comme les magistrats de la Cour suprême, les juges fédéraux sont nommés-es à vie par le président des États-Unis.

    Des attaques contre la science

    Etats-Unis : l'Académie des sciences française dénonce une "dérive autoritaire"

    Protestation. L’Académie des sciences française a appelé, 21 mars, les institutions scientifiques internationales à « dénoncer une dérive autoritaire néfaste pour la science », après le refoulement d’un chercheur français par les États-Unis, qualifié de source « de préoccupation » par le ministre français de la Recherche et de l’Enseignement supérieur Philippe Baptiste. L’académie s’élève « avec vigueur contre cette pratique » après le refoulement le 9 mars, selon le gouvernement français, d’un chercheur du Centre national de la recherche scientifique (CNRS), au motif de la présence dans son téléphone de messages privés considérés comme hostiles à la politique du président américain Donald Trump. Pour l’académie, cette décision de refoulement met « gravement en cause les libertés fondamentales du monde académique : liberté de pensée, d’expression et de voyage ». Le chercheur dans le domaine spatial a été empêché d’entrer sur le territoire américain où il devait participer à un congrès scientifique, indique l’AFP. L’académie « appelle les institutions scientifiques internationales à réagir à cette situation inédite et à dénoncer une dérive autoritaire néfaste pour la science ». Cet incident est survenu alors que depuis son retour à la Maison Blanche, Donald Trump a multiplié les annonces chocs visant la communauté scientifique (coupes budgétaires brutales, censure de certains sujets dans les recherches subventionnées...). En France, des scientifiques de premier plan se sont mobilisés-es en soutien à leurs collègues avec le mouvement « Stand Up for Science ».

    Tribune : "Stand Up for Science" et après ?

    La journée du 7 mars a donné lieu à une mobilisation inédite pour témoigner de la solidarité avec les universitaires américains-es, mais elle ne peut consister à accueillir une poignée de « stars », défend une tribune du Réseau Stand Up For Science. « Il faut maintenant garantir le financement de programmes, investir dans des emplois d’universitaires et de personnels ou encore réallouer le crédit d’impôt recherche », estiment plus de 2 000 chercheurs-ses. Depuis son retour à la Maison Blanche, Donald Trump mène une « offensive éclair d’une ampleur inédite contre les institutions démocratiques et les sciences » constatent les signataires de ce texte qui analyse une stratégie qui combine : « censure idéologique, prise de contrôle et destruction des données et des systèmes informatiques, suppression de financements, purges, intimidation voire terreur ». Et comme si cela ne suffisait pas, en parallèle, « la répression s’intensifie avec des menaces directes contre un grand nombre de scientifiques, d’universitaires, d’étudiantes et d’étudiants mais aussi contre des journalistes, des juges, des avocats, parce que les faits qu’ils mettent en évidence gênent les intérêts économiques ou contreviennent aux croyances du pouvoir et de ses soutiens, ou simplement parce qu’étrangers. »
    La journée Stand Up for Science du 7 mars a donné lieu à une mobilisation citoyenne et scientifique inédite pour témoigner de la solidarité avec les universitaires aux États-Unis, en Argentine et ailleurs, soulignent les signataires. Mais, pour eux, il « s’agit désormais d’aider concrètement les résistances, de mettre en œuvre les moyens effectifs de ces solidarités, mais aussi de constituer et de rendre viable un écosystème scientifique et universitaire mondial ». On pourrait penser que la France, grand pays de sciences, puisse apparaître comme un « refuge ». Pas si simple, estiment les signataires qui constate que notre pays « est en réalité [frappé] par des coupes budgétaires qui s’accumulent depuis plus de vingt ans, menaçant la viabilité de son propre système ». Les plus de 2 000 chercheurs-ses mobilisés-es avancent que le budget pour l’enseignement supérieur et la recherche a baissé de 1,5 milliards d’euros, tandis que 1,6 milliard d’euros de crédits ont été annulés pour 2024 et 2025. À suivre.

    Des attaques contre les personnes trans

    Personnes trans exclues de l'armée : une juge fédérale américaine suspend l'interdiction.

    Blocage. Une juge fédérale américaine a suspendu mardi 18 mars l’interdiction par l’administration Trump des personnes transgenres dans l’armée, invoquant le principe d’égalité. Citant la Déclaration d’indépendance des États-Unis selon laquelle « tous les êtres humains sont créés égaux », une juge fédérale de Washington a suspendu à compter du 21 mars un décret du président Donald Trump excluant les personnes transgenres des forces armées, indique l’AFP. « Pour nous assurer que nous disposons de la force combattante la plus létale au monde, nous allons débarrasser notre armée de l’idéologie transgenre », avait déclaré Donald Trump le 27 janvier en Floride, avant de préciser avoir signé un décret en ce sens. « Exprimer une fausse "identité de genre", divergente du sexe d’un individu ne peut satisfaire aux normes rigoureuses nécessaires au service militaire », peut-on notamment lire dans le décret. Un groupe de personnes transgenres, militaires ou souhaitant le devenir avaient alors contesté ce décret en justice. L’administration Trump pourrait avoir « défini une politique établissant un équilibre entre la nécessité pour le pays d’une armée préparée et le droit des Américains à l’égalité de protection devant la loi », écrit la juge. Mais le décret contesté « n’est pas cette politique », estime-t-elle, lui reprochant d’être « empreint d’hostilité » envers les personnes transgenres, sans justification légale ou rationnelle à leur exclusion des forces armées. En vertu de ce décret, le ministère américain de la Défense a indiqué en février son intention non seulement d’arrêter le recrutement des personnes transgenres dans les forces armées, mais aussi d’en expulser celles qui en font déjà partie, sauf dérogation spéciale. Le nombre de personnes transgenres dans l’armée américaine serait de quelque 15 000 sur environ deux millions de militaires, d’après les estimations.
    Le gouvernement américain a décidé de faire appel de la décision de la justice fédérale de suspendre l'interdiction par l'administration Trump des personnes transgenres dans l'armée, a indiqué mercredi 19 mars le ministre de la Défense Pete Hegseth. La veille, une juge fédérale de Washington avait suspendu le décret du président Trump (voir plus haut) excluant les personnes transgenres des forces armées.

    Des attaques contre les LGBT+

    Hongrie : une loi pour interdire la Marche des Fiertés

    Recul. Le Parlement hongrois a adopté mardi 18 mars une loi pour bannir la Marche des fiertés. Cette décision marque une escalade dans la politique LGBTphobe du Premier ministre nationaliste Viktor Orban qui vise explicitement à restreindre les droits des personnes LGBT+. Le nouveau texte « interdit la tenue d’un rassemblement qui violerait la législation » de 2021, selon laquelle il n’est pas possible de promouvoir auprès des mineurs-es « l’homosexualité et le changement de sexe ». Soumis seulement la veille des débats, le projet a été adopté via une procédure exceptionnelle à une large majorité par la coalition au pouvoir soutenue par des députés-es d’extrême droite (136 voix pour, 27 contre). L’opposition a perturbé le vote en allumant des fumigènes et en diffusant l’hymne russe dans l’hémicycle, rapporte l’AFP.
    La législation, qui modifie la loi sur la liberté de réunion, se prévaut de garantir que seuls les événements « respectant le droit des enfants à un développement physique, mental et moral correct [puissent] avoir lieu ». Pour les organisateurs-rices de la Marche des Fiertés, prévue cette année le 28 juin, c’est « une étape supplémentaire dans la fascisation de la société ». « Depuis notre enfance, nous devons lutter pour être acceptés-es et bénéficier de droits égaux. La Marche des fiertés porte ce combat de tous les jours dans la lumière », ont-ils-elles réagi, dénonçant « la tentative du pouvoir de les déshumaniser ». Les participants-es au défilé s’exposent à une amende pouvant aller jusqu’à 500 euros, somme « qui sera reversée aux fins de protection de l’enfance ». Le texte autorise la possibilité pour la police d’identifier les « contrevenants-es » via des outils de reconnaissance faciale. Malgré cette menace, des gens « ont envie de venir et d’afficher leur soutien à la communauté », a déclaré à l’AFP le porte-parole de la Marche, Mate Hegedus. « Nous n’allons pas nous laisser intimider par le gouvernement qui cherche un bouc émissaire », a-t-il insisté. Même si la loi entend surtout « dissuader les gens de participer » à la Marche des Fiertés, Szabolcs Hegyi, de l’association des libertés civiles TASZ, interrogé par l’AFP, met en garde contre une interdiction sur le modèle russe, « sans équivalent dans l’UE » et « totalement contraire à la Charte européenne des droits fondamentaux ». Où « va-t-on s’arrêter ? », s’inquiète-t-il. Si l’on modifie la liberté de réunion pour « l’adapter à des intérêts politiques, on risque d’arriver à une situation où virtuellement personne ne pourra manifester à l’exception de ceux favorables au gouvernement ».