Je fais un don

    L’Actu vue par Remaides : « Vaccin HPV : deux doses suffisent aussi chez les femmes vivant avec le VIH »

    • Actualité
    • 03.06.2025

    DEBORAH KONOPNICKI.jpg

     

     

    La Dre Deborah Konopnicki. Crédit photo : DR.

    Par Fred Lebreton

    Vaccin HPV : deux doses suffisent aussi chez les femmes vivant
    avec le VIH

    Moins d’injections, moins d’effets indésirables, et la même protection : une étude belge menée au CHU Saint-Pierre de Bruxelles démontre qu’un schéma à deux doses du vaccin Gardasil9 contre le HPV (papillomavirus humains) est aussi efficace que le schéma à trois doses actuellement recommandé pour les femmes vivant avec le VIH. Une avancée qui pourrait alléger le parcours vaccinal, réduire les coûts et élargir l’accès à cette prévention essentielle, notamment dans les pays à faibles ressources. Explications.

    Une efficacité équivalente avec deux doses de vaccin
    Faut-il vraiment trois doses du vaccin contre le HPV quand on vit avec le VIH ? Papillon, une étude belge publiée dans la revue scientifique Clinical Infectious Diseases vient bousculer les recommandations de l’OMS : chez les femmes vivant avec le VIH, deux doses du vaccin Gardasil9 contre les papillomavirus humains (HPV) seraient aussi efficaces que trois, tout en étant mieux tolérées. L’étude menée au CHU Saint-Pierre de Bruxelles, au sein du service des maladies infectieuses dirigé par la Dre Deborah Konopnicki, apporte une réponse claire. Jusqu’ici, les recommandations de l’OMS faisaient une distinction entre les personnes séronégatives — pour lesquelles deux doses du vaccin Gardasil9 suffisent — et les personnes vivant avec le VIH, censées en recevoir trois.

    Par ailleurs, il n’existait pas de données sur l’immunogénicité (la capacité d’un vaccin à déclencher une réponse du système immunitaire) du schéma à deux doses chez les femmes vivant avec le VIH. C’est désormais le cas, comme l’explique la chercheuse : « Les résultats montrent qu’à sept mois, soit un mois après la dernière injection, les patientes développaient des hauts taux d’anticorps neutralisants contre tous les génotypes d’HPV contenus dans le vaccin […] démontrant ainsi la non-infériorité du schéma en deux doses. » Autrement dit, pour les femmes vivant avec le VIH dont la charge virale est bien contrôlée (indétectable), deux doses permettent une protection efficace, c’est-à-dire l’apparition d’anticorps protecteurs chez des patientes qui n’en avaient pas avant.

    L’étude s’est déroulée entre 2018 et 2021 et a inclus 167 femmes âgées de 15 à 40 ans. Toutes étaient sous traitement antirétroviral avec une charge virale inférieure à 400 copies/ml. Après une phase initiale ouverte destinée à vérifier la sécurité du vaccin chez ce public encore peu étudié, 100 participantes ont été réparties dans deux groupes pour recevoir soit deux doses (à M0 et M6), soit trois doses (à M0, M2 et M6) du vaccin Gardasil9. L’objectif : prouver que le schéma simplifié était « non inférieur » au schéma complet en matière de réponse immunitaire. Mission accomplie : les taux de séroconversion atteignent 97,7 % dans le groupe deux doses et 97,9 % dans le groupe trois doses. Une différence négligeable sur le plan statistique, mais cruciale sur le plan pratique, économique et sanitaire.

    Moins d’effets indésirables et moins de coûts
    Au-delà de l’efficacité, c’est la tolérance du vaccin qui fait toute la différence. « Le schéma à deux doses était associé à significativement moins de réactogénicité [effets indésirables locaux, ndlr] du vaccin, en termes de fréquence, durée et nombre de symptômes », souligne la Dre Konopnicki. En résumé, les patientes ayant reçu seulement deux injections ont moins souffert de douleurs, rougeurs ou gonflements au point d’injection. Le taux de réactions locales rapportées s’élève à 60 % pour deux doses, contre 82 % pour trois doses, une différence statistiquement significative. Ces effets indésirables, bien que non graves, sont souvent un frein à l’adhésion vaccinale, notamment chez les personnes vivant avec le VIH, pour qui le suivi médical est déjà lourd. Les implications de ces résultats dépassent largement les frontières de la Belgique. En permettant de calquer le schéma vaccinal des femmes vivant avec le VIH sur celui des personnes séronégatives, cette étude ouvre la voie à une simplification bienvenue.

    « Ces résultats permettent d’appliquer aux femmes vivant avec le VIH le schéma recommandé par l’OMS pour les adultes séronégatifs au VIH […] et ainsi de réduire à l’avenir significativement les coûts pour les patients, pour les systèmes de santé en pays à hauts et bas revenus », se réjouit la clinicienne. La réduction du nombre de doses facilite en effet l’organisation des campagnes de vaccination, diminue les dépenses logistiques et pourrait améliorer l’acceptabilité du vaccin, notamment dans les contextes précaires. Une telle simplification représente un pas décisif vers une meilleure couverture vaccinale mondiale contre le HPV, virus responsable de nombreux cancers du col de l’utérus, mais aussi de la gorge, de l’anus ou du pénis. Chez les femmes vivant avec le VIH, qui sont plus exposées aux infections persistantes à HPV, l’enjeu est vital. Reste désormais à traduire ces résultats dans les recommandations internationales.