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    L'Actu vue par Remaides : Fermeture du site Aidsmap : « Merci et adieu ! »

    • Actualité
    • 09.07.2024

     

    aidsmap logo

    © DR

    Par Fred Lebreton et Jean-François Laforgerie

    Fermeture du site Aidsmap : "Merci et adieu"

    C’est la très mauvaise nouvelle du moment : la fermeture de l’excellent site d’infos sur le VIH et les hépatites virales, Aidsmap. Le site internet britannique a annoncé sa fermeture définitive dans un post publié lundi 1er juillet et sobrement intitulé : « Merci et adieu ». Cette décision a été prise par le National AIDS Manual qui a créé le site pour des raisons financières. Autre info importante, la publication d’un sondage sur « Les Français-es et la prévention contre le VIH » mené par Toluna Harris Interactive pour le compte de la firme pharmaceutique Gilead et dont les résultats ont été rendus publics le 18 juin. La rédaction de Remaides fait le point sur l’actu VIH.

    Ce n’est jamais un bon signal lorsqu’un média communautaire ferme ses portes et, à la stupéfaction générale, le site internet britannique Aidsmap a annoncé sa fermeture définitive dans un post publié lundi 1er juillet et sobrement intitulé : « Merci et adieu » : « C'est avec le cœur lourd que nous annonçons la fermeture de notre chère association, NAM Aidsmap, ce mois-ci. Après 37 ans de journalisme en santé pionnier, d'engagement communautaire et d'autonomisation par l'information, nous cesserons nos activités, cet été. Nous sommes extrêmement fiers des millions de personnes que nous avons touchées dans le monde entier et de l'ingéniosité et de l'engagement de notre équipe et de nos partenaires ».
    Le National AIDS Manual a été fondé par des bénévoles du London Lesbian and Gay Switchboard en 1987, à une époque où il n'existait aucun traitement efficace contre le VIH et où il y avait très peu d'informations fiables. À cette époque, le NAM est un gros manuel en papier qui va vite devenir un outil de référence pour les professionnels-les de santé et pour les personnes vivant avec le VIH. Devenu un site web, Aidsmap est resté une source d'informations précise et fiable sur le VIH et les hépatites virales au fil des ans, couvrant les principaux événements scientifiques et rendant les informations sur le traitement, la prévention et le soutien accessibles à un public plus large. 

    Comment expliquer cet arrêt soudain d’un pilier de l’information VIH dans le monde ? Aidsmap avance des explications : « Comme vous le savez peut-être, le secteur du VIH fait face à de nombreux défis et incertitudes. Avec un accès plus large à la prévention et au traitement, et des informations plus largement accessibles, il est devenu de plus en plus difficile pour nous de sécuriser des financements face à l'augmentation des coûts. Malheureusement, le Conseil d'administration a pris la décision difficile de proposer la fermeture d'Aidsmap en juillet. Malgré l'exploration d'alternatives, nous ne voyons pas de voie durable pour l'avenir. Nous devons prendre cette décision tant que nous sommes encore solvables afin d'assurer une fermeture respectueuse et ordonnée pour notre personnel, nos journalistes freelance, nos partenaires, nos bailleurs de fonds, nos bénéficiaires et nos fournisseurs », explique l’organisation.
    Cette annonce a suscité de nombreuses réactions sur X (ex Twitter). Deux exemples, Matthew Hodson, l’ancien rédacteur en chef de Aidsmap : « C'est avec une grande tristesse que j'ai appris la fermeture de @aidsmap. Comme beaucoup d'autres, Aidsmap a été une source inestimable d'informations et de réconfort pour moi lorsque j'ai été nouvellement diagnostiqué avec le VIH. On m'a souvent dit que les informations sérieuses qu'il fournissait étaient une bouée de sauvetage ». De son côté, la journaliste américaine Liz Highleyman a partagé son émoi : « Une nouvelle triste et inattendue. Une véritable perte pour la communauté VIH/sida. Je suis fière et privilégiée d'avoir travaillé avec @aidsmap en tant que journaliste freelance pendant les vingt dernières années ».
    La rédaction de Remaides remercie les équipes de NAM Aidsmap pour le travail titanesque accompli depuis 37 ans. Merci et adieu.

     

    Les Français-es et la prévention contre le VIH

    C’est le sujet d’une récente enquête menée par Toluna Harris Interactive pour le compte de la firme pharmaceutique Gilead et dont les résultats ont été rendus publics le 18 juin.
    Aujourd’hui, six Français-es sur dix estiment que l’on ne parle pas assez du VIH. Plus globalement, plus de la moitié des Français-es estiment que l’on ne parle pas assez des différents sujets liés à la sexualité, qu’il s’agisse des différentes IST, des troubles sexuels, du consentement ou encore des violences sexuelles, explique l’institut. Il note (ce qui est tout de même une surprise) que les « les IST autres que le VIH (chlamydia, gonorrhée, syphilis, papillomavirus, etc.) apparaissent au premier rang des thèmes dont il faudrait parler davantage aux yeux des Français-es, devant le VIH lui-même ». Quant à l’idée que l’on parlerait « trop » de ces différents sujets, elle apparaît aujourd’hui marginale (moins d’une personne sur dix le dit pour la plupart des sujets). Les moins de 35 ans, et en particulier les femmes de cette tranche d’âge, ne montrent pas les mêmes préoccupations que leurs aînés-es, mettant d’abord l’accent sur les troubles sexuels avant les IST et le VIH. Enfin, on remarque que les hommes de moins de 35 sont plutôt en retrait sur l’ensemble de ces questions par rapport au reste de la population.
    Selon l’enquête, les Français-es se sentent bien, de prime abord, informés-es sur le sujet du VIH (82 %, dont 22 % « très bien informés-es »). Une opinion relativement stable depuis trois ans, et particulièrement forte chez les générations plus âgées. Mais comme chacun-e sait le diable se cache dans les détails. En effet, les moyens de transmission du virus ne sont pas toujours bien identifiés. Les relations sexuelles non protégées [par préservatifs, précisons-le] avec pénétration et le contact du sang sont les situations perçues comme les plus à risque, devant la transmission à l’enfant pendant la gestation. Mais surtout, les Français-es font peu la différence entre les situations avec et sans traitement, comme si le traitement n’avait pas, à leurs yeux,  d’impact sur la transmission. Et pour cause, ils-elles connaissent encore assez mal la Prep, selon l’enquête, puisque seuls 28 % indiquent en avoir déjà entendu parler. Quant aux autres moyens de prévention possibles, les personnes identifient bien le préservatif (perçu comme le moyen de prévention le plus efficace, derrière l’abstinence), mais voient peu les autres mesures évoquées (dépistage, traitement d’urgence post-exposition, Prep) comme des moyens de se protéger. Pour autant, lorsqu’ils-elles considèrent ces différentes mesures comme des moyens de prévention, les Français-es se montrent conscients-es que celles-ci ne peuvent offrir une « protection infaillible contre le virus ». Même le préservatif est perçu comme un élément qui « protège mais pas à 100% » par une majorité (53 %).
    Autre élément, le VIH/sida garde aujourd’hui l’image d’une « maladie effrayante » (82 %), et dont on meurt encore beaucoup (66 %). Rares sont ceux-celles qui la caractérisent comme une maladie du passé (13 %). Le sida conserve également l’image d’une maladie qui ne se guérit pas auprès d’une majorité de la population (63 %), même si 33 % pensent le contraire. L’image de la maladie n’est que peu influencée par l’orientation sexuelle, mais diffère, en revanche, selon l’âge, avec une peur plus marquée chez les générations les plus âgées, et une distance plus grande chez les plus jeunes qui y voient davantage une « maladie du passé ». Ainsi, l’idée qu’avoir un rapport non protégé (par un préservatif) est moins dangereux que par le passé, certes minoritaire dans l’ensemble (23 %), s’avère nettement plus répandue chez les moins de 35 ans (39 %). L’idée que la plupart des IST, aujourd’hui, ne sont pas graves et se soignent facilement est également plus répandue chez les plus jeunes que leurs aînés (41 % contre 36 % en moyenne), tout comme l’idée que les préservatifs sont aujourd’hui utilisés pour éviter une grossesse plutôt que contre le VIH et les IST (63 % contre 55 % en moyenne). Quant au risque perçu d’être touché par le virus, si une personne sur trois le considère élevé pour la population française en général, seuls 13 % considèrent ce risque élevé pour eux-elles personnellement. Un chiffre plus élevé chez les moins de 35 ans mais sans différence très nette selon l’orientation sexuelle, indique l’enquête. Cependant, l’impression d’avoir un risque « très faible » d’être infecté-e concerne davantage les personnes hétérosexuelles (58 %) que les personnes homosexuelles (29 %), qui évoquent plus souvent un risque « plutôt faible ».
    Autre enseignement de cette étude : « Face au VIH, les Français-es montrent des comportements de protection réels, mais pas toujours systématiques. En effet, chez les 52 % de Français-es qui indiquent avoir rencontré au moins un nouveau partenaire sexuel au cours des dernières années, plus de la moitié indiquent ne pas s’être protégés-es systématiquement (53 %). Un chiffre en hausse par rapport à 2020 (+ quatre points) et plus fréquemment rapporté chez les homosexuel(les) que la moyenne. La raison la plus souvent avancée est la confiance accordée au-à la partenaire, et ce, chez toutes les tranches d’âge. Le confort et le fait de ne pas avoir de préservatifs sur soi sont également souvent mentionnés. En revanche, la question du coût des préservatifs n’apparaît pas parmi les premières raisons invoquées — d’ailleurs, la gratuité des préservatifs pour les moins de 26 ans n’est que partiellement connue de la population, même chez les premiers concernés : seul un-e jeune de 15 à 25 ans sur deux indique être au courant de cette mesure ». Concernant le dépistage, s’il est appliqué, il est encore loin d’être un réflexe infaillible. Près d’une personne sur trois admet ne pas se faire dépister systématiquement en cas de rapport exposant à un risque, et davantage encore chez les personnes homosexuelles et les moins de 35 ans. Parmi les premières raisons invoquées, l’impression de ne pas se sentir concerné-e, l’absence de symptômes et le fait de procrastiner.
    À qui parler du VIH ? Les interlocuteurs-rices privilégiés-es des Français-es sont d’abord les professionnels-les de santé, avec qui il apparaît facile, voire très facile, d’aborder le sujet. Chez les femmes, le gynécologue apparaît comme l’interlocuteur-rice avec qui il est le plus facile d’en parler. Chez les moins de 35 ans, le sujet semble légèrement plus délicat à aborder d’une manière générale, et notamment avec le-la médecin de famille, tandis que les parents apparaissent comme les derniers interlocuteurs envisagés. Et pourtant, de leur côté, les parents semblent aborder le sujet plutôt facilement avec leurs enfants : près des trois quarts d’entre eux indiquent en avoir déjà parlé avec leur enfant âgé de 10 à 25 ans, dont 47 % déclarent l’avoir fait spontanément, indique l’enquête.
    Enfin, parmi les différents canaux possibles pour s’informer sur le VIH, quel que soit leur âge, les Français-es privilégient nettement les sites institutionnels, loin devant les articles de revues spécialisées, les émissions TV, les forums ou les vidéos d’influenceurs-ses. Cependant, notons que les moins de 35 ans s’appuient légèrement davantage sur les forums, leur entourage ou encore les vidéos d’influenceurs-es par rapport à leurs aînés-es.

    Enquête réalisée en ligne du 7 au 11 juin 2024. Échantillon de 2 051 personnes représentatif de la population française âgée de 15 ans et plus. Méthode des quotas et redressement appliqués aux variables suivantes : sexe, âge, catégorie socioprofessionnelle et région de l’interviewé(e).