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    L'Actu vue par Remaides : Grande enquête nationale « Tabac et VIH »

    • Actualité
    • 12.07.2024

    tabac

    © DR

    Par Fred Lebreton et Jean-François Laforgerie

    Grande enquête nationale "Tabac et VIH"

    Période chargée concernant les infos sur les drogues et produits. Actions Traitements lance une importante étude nationale « Tabac et VIH », qui se déroulera jusqu’en septembre. En France toujours, un adulte sur dix a déjà consommé de la cocaïne, nous explique ainsi une étude de l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives, publiée fin juin. De son côté, l’Observatoire européen des drogues et des toxicomanies (EMCDDA) a publié son rapport annuel dans lequel il explique que « des drogues plus fortes et plus pures circulent en Europe.La rédaction de Remaides fait le point sur l’actu concernant les produits.

    Pourquoi cette enquête ? Ipsos, un institut d’études indépendant, a été mandaté par Actions Traitements pour réaliser une enquête « en miroir » auprès des personnes vivant avec le VIH fumeuses ou ex-fumeuses (cigarettes, chicha, cannabis, etc.) d’une part et des professionnels-les de santé accompagnant les personnes séropositives fumeuses ou ex-fumeuses, d’autre part. Cette étude vise à trouver les bons leviers, les bons messages pour accompagner celles et ceux qui le souhaitent dans une démarche d’arrêt du tabac, explique Actions Traitements. L'objectif est de dresser un panorama complet des situations vécues et des expériences rencontrées par les personnes concernées. Cela permettra d'identifier les mesures considérées comme les plus efficaces, mais aussi les besoins et attentes exprimées par les fumeurs-ses vivant avec le VIH et les professionnels-les de santé qui les accompagnent.
    Plus il y aura de participants-es à l’enquête plus celle-ci sera crédible et rendra compte de toutes les situations vécues. Plus l'enquête sera crédible, plus les résultats rencontreront un écho auprès de celles et ceux qui sont engagés-es auprès des personnes vivant avec le VIH. C’est pour ces raisons que votre participation est essentielle. Que vous soyez personnes vivant avec le VIH ou professionnels-les de santé, votre témoignage est donc essentiel pour obtenir la vision la plus juste possible de l’ensemble des situations vécues par les personnes vivant avec le VIH, qu’elles soient fumeuses ou ex-fumeuses. Comment participer ?

    Si vous êtes une personne vivant avec le VIH, qui fume actuellement ou qui a déjà fumé par le passé, c’est ici.

    Si vous êtes un-e professionnel-le de santé (infectiologue, généraliste, autre médecin spécialiste, pharmacien-ne, infirmier-ère, etc.), c’est ici.

     

    En France, un adulte sur dix a déjà consommé de la cocaine

    La consommation de cocaïne « explose » en France, où une personne adulte sur dix en a déjà pris au moins une fois dans sa vie, montre une étude de l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT) publiée mercredi 26 juin.  Cette enquête porte sur les représentations, opinions et perceptions sur les psychotropes (EROPP). Elle a été réalisée au cours de l’année 2023 sur le territoire hexagonal, sur un échantillon représentatif de 14 984 personnes âgées de 18 à 75 ans. « La cocaïne est de plus en plus disponible. L’offre a beaucoup augmenté, avec des saisies records, dans un contexte de production en hausse considérable, un prix qui stagne — entre 60 et 70 euros le gramme — alors que la pureté augmente », rappelle à l’AFP, Guillaume Airagnes, directeur de l’OFDT.  La Colombie, premier producteur mondial, a battu en 2022 un nouveau record avec 1 738 tonnes de cocaïne fabriquées. La même année, 27,7 tonnes de cocaïne ont été interceptées en France, selon le dernier bilan des autorités, un chiffre multiplié par cinq en dix ans. « On peut ajouter à cela la démocratisation de l’usage avec une plus grande variété de types de consommation : festives, mais aussi dans des métiers où la pénibilité est forte », précise-t-il. En 2023, près d’une personne adulte sur dix (9,4 %) a consommé au moins une fois de la cocaïne au cours de sa vie, contre 5,6 % en 2017. L’usage actuel (au moins une fois au cours des douze derniers mois) connaît une trajectoire exponentielle : la consommation a été multipliée par dix entre 1992 (0,3 %) et 2023 (2,7 %). Même constat pour la MDMA (ecstasy) : la prévalence d’usage au cours des douze derniers mois est passée de 0,2 % en 2000 à 1,8 % en 2023, alors que l’expérimentation a bondi entre 2017 (5 %) et l’an dernier (8,2 %). Par ailleurs, depuis trente ans, le cannabis reste la drogue illicite la plus consommée en France et sa diffusion n’a cessé de progresser, avec un prix entre huit et dix euros le gramme, respectivement pour la résine et l’herbe. Son taux d’expérimentation est passé de 12,7 % en 1992 à 50,4 % en 2023, soit une personne adulte sur deux. L’usage régulier demeure stable depuis 2014, concernant 3,4 % des adultes en France l’an dernier. « On constate une tendance au vieillissement, avec des jeunes qui consomment moins alors que cela augmente chez les personnes plus âgées », nuance Guillaume Airagnes. L’expérimentation de l’héroïne a, elle aussi, augmenté, passant de 1,3 % en 2017 à 2 % des adultes l’an dernier, avec un taux d’usage au cours des douze derniers mois stable ces dernières années à 0,3 %. La majeure partie de l’héroïne consommée en Europe provient d’Afghanistan, où l’interdiction de la culture du pavot à opium depuis avril 2022 avec le retour des Talibans au pouvoir risque de réduire sa disponibilité sur les marchés, voire de causer des pénuries. Son offre reste pour l’instant stable, avec un prix au détail autour de 30 euros le gramme.  L’étude de l’OFDT inclut pour la première fois les usages de kétamine, de 3MMC et de GHB/GBL, trois produits de synthèse souvent prisés dans les pratiques de « chemsex ». L’expérimentation de la kétamine, un anesthésiant détourné à des fins récréatives, atteint 2,6 % chez les adultes de 18 à 64 ans et concerne majoritairement les jeunes de 25 à 34 ans (4,8 %). La kétamine se vend en poudre ou en cristaux pour 40 euros le gramme et arrive par fret postal, achetée sur le « darknet » depuis l’Asie du Sud-Est, en Inde notamment. Pour la 3MMC (cathinone de synthèse) et le GHB-GBL (un anesthésique et un solvant industriel, tous deux détournés de leur usage d’origine), les taux d’expérimentation sont inférieurs à 1 %.

    Des drogues plus fortes et plus pures en Europe, selon un rapport officiel

    L’Observatoire européen des drogues et des toxicomanies (EMCDDA) a publié son rapport annuel le 11 juin dernier. Il évoque des substances de synthèse à forte teneur, des mélanges de produits inédits, une hausse de la polyconsommation (le fait de consommer plusieurs produits)... En Europe, il y a un « marché des drogues extrêmement complexe et en évolution rapide, où les drogues « illicites » sont largement accessibles et où de nouvelles substances de synthèse à forte teneur continuent d’émerger », analyse le directeur de l’Observatoire, Alexis Goosdeel, cité dans un communiqué de l’EMCDDA. Le rapport pointe des consommateurs-rices désormais exposés-es à « un éventail plus large de substances psychoactives, qui sont souvent plus puissantes ou plus pures ou apparaissent sous de nouvelles formes, dans de nouveaux mélanges ou en nouvelles combinaisons », souligne l’instance européenne, citée par l’AFP.  Comme chaque année, le rapport fait également le point sur les nouvelles substances psychoactives (NSP). En 2023, vingt-six nouvelles drogues ont été signalées pour la première fois en Europe, portant le nombre total des substances psychoactives surveillées par l’EMCDDA à plus de 950.  Autre élément mis en avant : la polyconsommation est désormais courante en Europe. Elle est définie comme le fait de prendre de manière simultanée ou successive, deux ou plusieurs substances psychoactives. Les « cocktails » les plus fréquents sont la consommation de benzodiazépines avec des opioïdes ou de la cocaïne avec de l’alcool. L’EMCDDA note qu’il pourrait y avoir une moindre disponibilité de l’héroïne, ce qui jouerait sur le niveau de consommation en Europe. Le manque d’héroïne pourrait conduire à combler les lacunes du marché par des opioïdes de synthèses à forte teneur. L’EMCDDA pointe ainsi la menace émergente des nitazènes, qui sont 500 fois plus puissants que la morphine.  « En 2023, les nitazènes ont été associés à une forte augmentation du nombre de décès en Estonie et en Lettonie et à des foyers d’intoxication localisés en France et en Irlande », souligne le rapport.
    Pour la sixième année consécutive, la cocaïne produite en Amérique du Sud déferle toujours plus sur le Vieux continent, arrivant en grandes quantités ; en témoigne le total de 323 tonnes saisies en 2022, après 301 en 2021. Les données récentes montrent que 116 tonnes ont été interceptées l’an dernier dans le seul port d’Anvers (Belgique) et que des ports plus modestes — supposément plus vulnérables au trafic de drogue — sont désormais visés, comme en Suède ou en Norvège.  De l’avis même des autorités, seule une infime partie du volume de la cocaïne importée en Europe est saisie par les forces de l’ordre. La cocaïne est le stimulant illicite le plus plébiscité en Europe, consommée par quatre millions d’adultes (15-64 ans) l’an dernier.  Sa grande disponibilité en Europe a une incidence de plus en plus négative sur la santé publique : le produit est associé à environ un cinquième des décès par surdose signalés en 2022, souvent en combinaison avec d’autres substances.  « Il s’agit de la deuxième drogue illicite la plus fréquemment signalée tant par les personnes admises en traitement pour la première fois (29 000 en 2022) que par celles qui se présentent aux services d’urgence des hôpitaux », alerte l’EMCDDA. Le cannabis reste la première drogue consommée par plus de 22,8 millions de personnes adultes européennes en 2023, dont 15,1 millions chez les jeunes adultes (15-34 ans). Le rapport s’inquiète, cette année encore, de l’impact des dérivés synthétiques du cannabis sur la santé publique, comme l’hexahydrocannabinol (HHC), premier cannabinoïde semi-synthétique signalé dans l’UE.  En mars 2024, le HHC a été inscrit sur la liste des substances réglementées dans au moins dix-huit États membres de l’UE.

    Maryland : 175 000 condamnations pour usage de cannabis annulées

    Geste. Le gouverneur démocrate du Maryland, près de Washington, a exercé lundi 17 juin, son droit de grâce pour 175 000 condamnations pour consommation de cannabis, revendiquant « la plus vaste grâce au niveau d’un État dans l’histoire américaine », un an après la dépénalisation de cette drogue dans cet État. Bien que les trois quarts des Américains-nes vivent désormais dans un État où le cannabis est légal, il ne l’est toujours pas au niveau fédéral. Le ministère de la Justice de l’administration du président Joe Biden a officiellement publié en mai sa recommandation de le reclasser dans une catégorie de drogue moins dangereuse qu’actuellement, rappelle l’AFP. Comme plusieurs autres États, le Maryland a voté par référendum en novembre 2022 la légalisation de l’usage récréatif et de la vente au détail du cannabis, entrée en vigueur le 1er juillet 2023. Premier gouverneur noir du Maryland, Wes Moore a signé le décret de grâce portant sur 175 000 condamnations antérieures à 2023 lors d’une cérémonie lundi. « L’acte que nous accomplissons ensemble (….) aura des conséquences directes pour des dizaines de milliers d’habitants du Maryland », s’est félicité Wes Moore. Cette grâce permet de réparer des injustices sociales et ethniques, a affirmé le gouverneur, rappelant que « la légalisation ne fait pas remonter le temps en ce qui concerne les dégâts causés par la guerre contre la drogue » aux États-Unis. La légalisation « n’efface pas le fait que les habitants noirs du Maryland avaient trois plus de probabilités que les habitants blancs d’être arrêtés pour possession de cannabis », a-t-il ajouté, soulignant les difficultés d’accès à l’emploi, au logement ou à l’éducation générées par une condamnation pénale. Au nom de l’organisation Last Prisoner Project, qui milite pour l’annulation des condamnations prononcées en vertu de lois désormais caduques, un de ses responsables, Jason Ortiz, a salué les initiatives du Maryland pour « réparer les disparités raciales historiques provoquées par la prohibition du cannabis », indique l’AFP. Au niveau fédéral, le cannabis reste classé en catégorie 1, celle des substances considérées comme très addictives et sans intérêt médical, telles que l’héroïne, mais le ministère de la Justice a recommandé son passage en catégorie 3, comprenant des substances présentant un risque de dépendance modéré à faible. « Personne ne devrait être en prison uniquement pour utilisation ou possession de marijuana, point final », a déclaré le président Joe Biden dans une vidéo publiée en mai. Le démocrate avait annoncé en octobre 2022 une série de mesures pour effacer les condamnations fédérales de personnes sanctionnées pour simple possession de cannabis, levant ainsi des obstacles qu’elles pouvaient rencontrer en termes d’accès à l’emploi ou au logement. Il avait, par ailleurs, appelé les autorités sanitaires et judiciaires à repenser les peines associées à la marijuana. En 2020 et en 2022, la Chambre des représentants alors dominée par les démocrates avait adopté une proposition de loi visant à retirer le cannabis de la liste fédérale des drogues dangereuses, mais s’était heurtée à l’opposition du Sénat.

    Crise des opiacés : la Cour suprême américaine versus la famille Sackler

    Histoire sans fin. La Cour suprême américaine a annulé jeudi 27 juin un accord d’indemnisation de quelque six milliards de dollars dans la crise des opiacés, au motif qu’il exonérait la famille Sackler, propriétaire du laboratoire Purdue, de toutes futures poursuites émanant de victimes de la crise des opiacés. Les Sackler sont accusés d’avoir promu de façon musclée pendant des années leur médicament antidouleur OxyContin tout en ayant connaissance de son caractère très addictif. La vente de ce médicament leur a rapporté des dizaines de milliards de dollars. La sur-prescription de cet opiacé est généralement considérée comme le déclencheur de la crise qui a fait plus d’un demi-million de victimes en vingt ans aux États-Unis… et de très nombreuses victimes un peu partout dans le monde. Le ministère de la Justice américain reprochait à cet accord — conclu en 2022 avec les 50 États américains ayant engagé des poursuites judiciaires, des collectivités locales et des victimes individuelles ayant fait de même, et validé par une cour d’appel fédérale — de protéger la famille Sackler de toutes futures poursuites, y compris venant de victimes qui n’avaient pas consenti à cet accord. Il s’agit notamment de municipalités et de tribus canadiennes ; le Canada est très exposé, lui aussi, à cette crise sanitaire. « Le Code des faillites n’autorise pas (...) une immunisation vis-à-vis des poursuites sans le consentement des plaignants affectés », écrit, au nom de la majorité, Neil Gorsuch, auquel se joignent trois autres juges conservateurs et une juge progressiste. « Ce que les Sackler ont accepté de mettre sur la table pour les victimes des opioïdes est loin d’approcher la totalité de leurs biens », affirme-t-il, rappelant qu’ils avaient « siphonné » quelque onze milliards de dollars du laboratoire Purdue dans les années précédant sa déclaration de faillite en 2019. « Cela ne les empêche pourtant pas de demander une décision judiciaire qui éteindrait virtuellement toute poursuite à leur encontre pour fraude, blessure volontaire et même décès imputable à une faute, tout cela sans le consentement de ceux qui ont engagé de telles poursuites ou voudraient le faire », selon l’arrêt. Dans son avis de désaccord, le juge Brett Kavanaugh, auquel se joignent un autre conservateur, le président de la Cour John Roberts, et deux progressistes, dénonce au contraire « une décision erronée en droit et dévastatrice pour plus de 100 000 victimes des opioïdes et leur famille », pointant le caractère aléatoire d’un meilleur accord à l’avenir.  « Chaque victime ou créancier recevra l’équivalent d’un billet de loterie pour une possible future réparation pour (tout au plus) quelques-uns », s’inquiète-t-il. Le laboratoire Purdue a également déploré une « décision désespérante car elle invalide un accord (...) qui aurait apporté des milliards de dollars pour l’indemnisation des victimes, la réparation des conséquences de la crise des opioïdes et les médicaments contre les surdoses et l’addiction aux drogues ». Il assure néanmoins dans un communiqué que cela ne le dissuadera pas de poursuivre « le double objectif d’utiliser les dollars de l’accord pour remédier aux dégâts des opioïdes et de transformer l’entreprise en agent du bien ». Visé par une avalanche de poursuites, Purdue s’est déclaré en faillite en 2019 et négocie depuis un plan dont la dernière version prévoit sa fermeture aux États-Unis au profit d’une nouvelle entité et le paiement d’au moins 5,5 milliards de dollars sur 18 ans, rappelle l’AFP. La Cour suprême avait suspendu, en août, cet accord à la demande du gouvernement. Lors des débats en novembre, les neuf juges s’étaient montrés-es inhabituellement tiraillés-es, balançant entre le risque de compromettre l’indemnisation des victimes, et celui de reconnaître à une cour, dans une affaire de faillite, le droit d’immuniser les Sackler contre de futures poursuites. L’avocat représentant les victimes ayant souscrit à l’accord, Pratik Shah, avait estimé « irresponsable de la part du syndic de faillite de suggérer qu’il y a une sorte d’alternative secrète pour obtenir réparation », affirmant que « sans l’exemption, le plan se délitera ».