L’Actu vue par Remaides : « Face aux discriminations LGBT+, Queer Pantin exige des réponses concrètes »
- Actualité
- 02.06.2025
Crédit photo : Queer Pantin
Par Fred Lebreton
Face aux discriminations LGBT+, Queer Pantin exige
des réponses concrètes
À Pantin (Seine-Saint-Denis), l’association Queer Pantin tire la sonnette d’alarme : violences verbales, agressions physiques, méfiance envers la police… Un rapport inédit dévoile l’ampleur des discriminations LGBTQphobes dans la vie quotidienne des habitants-es du 93. Témoignages à l’appui, l’étude appelle les pouvoirs publics à sortir de leur silence et à agir enfin, localement comme nationalement.
Des violences omniprésentes et des institutions défaillantes
« Discriminé·es, invisibles et abandonné·es » : le titre du rapport publié par l’association Queer Pantin, le 14 mai dernier, donne le ton. Pendant plusieurs mois, les membres de cette association LGBT+ implantée en Seine-Saint-Denis ont mené une enquête de terrain inédite, relayée via un questionnaire auquel 329 personnes ont répondu.
Près de 90 % d’entre elles s’identifient comme LGBT+. L’objectif affiché est clair : produire leurs propres données, face à l’absence de statistiques locales, et mettre en lumière une réalité trop souvent négligée.
Les résultats de cette initiative citoyenne, rendus publics lors d’un événement rassemblant élus-es, journalistes et associations, dessinent un tableau inquiétant : 88 % des répondants-es déclarent avoir été victimes de discriminations ou de violences en raison de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre. Et ces violences ne se limitent pas aux insultes ou aux moqueries. Elles sont plurielles, envahissantes, souvent traumatisantes. Ainsi, 85 % des personnes interrogées rapportent avoir subi des violences verbales, 38 % des violences sexuelles, 32 % des agressions physiques et 19 % un viol ou une tentative de viol. L’espace public est de loin le lieu le plus dangereux : 58 % des violences y sont perpétrées, notamment dans la rue ou les transports en commun. Mais la menace s’immisce partout — jusque dans les commerces, les services administratifs, les lieux de soin, le travail, voire le domicile même des victimes.
Ce constat alarmant est aggravé par un sentiment d’abandon institutionnel massif. Les répondants-es expriment une défiance profonde envers les autorités censées les protéger. Près de huit personnes sur dix déclarent ne pas avoir confiance en la police pour prendre en charge les faits de LGBTphobie, et 59 % ne croient pas davantage en la justice. En pratique, cela se traduit par une absence quasi totale de recours : 92 % des victimes n’ont jamais porté plainte. Moins de la moitié connaissent les démarches à suivre après une agression. Le rapport met en cause une culture d’accueil défaillante et des réponses institutionnelles inadaptées. « Les plaintes sont mal reçues, banalisées, ou ignorées », déplore Queer Pantin. Cette défiance produit des effets en chaîne : 96 % des victimes n’ont jamais parlé de leur agression à une association spécialisée, renforçant leur isolement et accentuant l’impact psychique des violences subies.
Car au-delà des coups et des mots, ce sont aussi des trajectoires de vie entravées qui se dessinent : selon le rapport, 69 % des répondants-es modifient leur comportement en public par peur d’être attaqués-es. Et 51 % évitent d’exprimer une quelconque marque d’affection à leur partenaire dans l’espace public, par crainte des représailles. Le climat décrit est celui d’une menace permanente, face à laquelle chacun-e développe des stratégies d’invisibilisation ou d’évitement. Un constat partagé par Queer Pantin : « Ce rapport est un cri d’alarme et un acte de résistance. Les témoignages recueillis sont bouleversants, mais nécessaires. À présent, les pouvoirs publics doivent entendre et agir. »
Un appel à agir pour ne plus subir
L’ambition de Queer Pantin ne se limite pas à dresser un état des lieux des violences LGBTphobes dans leur ville et au-delà. L’association formule une série de recommandations concrètes à destination des institutions, à tous les échelons : local, départemental et régional. Car ce que les chiffres révèlent, ce sont aussi des marges de progrès évidentes, à portée de main.
Première revendication : une campagne d’information visible et pérenne sur les droits des personnes LGBT+, à destination du grand public, mais aussi des victimes, trop souvent ignorantes des dispositifs d’aide existants.
Deuxième urgence : former les agents-es publics, notamment les services de police, de justice, de santé et les élus-es, à la prise en charge des violences discriminatoires. Une sensibilisation systématique est indispensable pour enrayer les logiques de banalisation et de méfiance institutionnelle. Queer Pantin appelle également à la création de lieux d’accueil sécurisés, animés par des professionnels-es formés-es, pour accueillir les victimes dans un cadre sécurisant et compétent. Enfin, l’association plaide pour un soutien financier durable aux associations LGBT+ locales, dont l’action est jugée essentielle, mais reste trop souvent entravée par la précarité des financements.
Ce plaidoyer est aussi un message adressé à la société civile : la lutte contre les LGBTphobies ne peut reposer uniquement sur les épaules des personnes concernées. Elle exige une mobilisation collective, transversale et durable. En rendant visibles les violences, en donnant la parole aux victimes et en transformant les témoignages en leviers d’action, Queer Pantin propose une autre voie : celle d’un territoire plus sûr, plus juste, plus inclusif. Cette initiative montre que la collecte de données communautaires peut être un puissant outil de transformation sociale. Elle rappelle aussi, sans détour, que les violences LGBTphobes ne sont ni marginales, ni isolées. Elles structurent encore le quotidien de trop de personnes en Seine-Saint-Denis, les poussant à taire leur identité ou à fuir certains lieux.
Le rapport intégral disponible en ligne ici.
Pour suivre l’association Queer Pantin Facebook & Instagram : @QueerPantin