Je fais un don

    L'actu vue par REMAIDES : "Culture et VIH… par ici les sorties"

    • Actualité
    • 30.05.2024

    PODCAST PEDES

    © France Culture

    Par Jean-François Laforgerie et Fred Lebreton 

    Culture et VIH : par ici les sorties

    Il n’y a pas que les droits, les actus sociales, les nouvelles du monde, les news relatives aux discriminations qui font l’actualité… la culture s’y met aussi. Il ne faut pas rater la série passionnante documentaire sonore intitulée « Pédés : réinventer le monde », réalisée par Camille Desombre (pseudo du journaliste et militant Matthieu Foucher) et par Gilles Blanchard pour l’émission LSD sur France Culture. Pas besoin de passer dans la capitale belge pour découvrir : « VIH : une exposition virtuelle sur les 30 ans de lutte d’Ex Æquo à Bruxelles ». Elle aussi vaut le détour. Les épidémies (dont celle du VIH) s’exposent encore une fois au Musée Confluences de Lyon avec « Épidémies, prendre soin du vivant ». Enfin, on vous recommande aussi : Treize films pour comprendre l'identité de genre. Remaides fait le point.

    Podcast : "Pédés : réinventer le monde"

    « Qu’est-ce qu’un pédé ? Au-delà de l’injure et du langage, pédé implique des violences spécifiques. Si certains se réapproprient le stigmate, se dire pédé n’est pas une trajectoire homogène. Plus qu’orientation sexuelle, pédé serait-il un genre ? ».  C’est une des questions que se pose Camille Desombre (pseudo du journaliste et militant Matthieu Foucher) dans sa série documentaire sonore intitulée « Pédés : réinventer le monde », réalisée par Gilles Blanchard pour l’émission LSD sur France Culture. En quatre épisodes d’une heure chacun, la série prend le temps et donne la parole à près de 50 hommes gays/bis/queer dans toute leur diversité (jeunes, vieux, blancs, racisés, cis, trans, etc.). Parmi les personnes interrogées, citons Antoine Idier (sociologue et historien, auteur de Les vies de Guy Hocquenghem), Sœur Zora des Pâquerettes et Sœur Hémonie du Souvenir (Sœurs de la Perpétuelle Indulgence), Michel Chomarat (activiste gay et interpellé de l’affaire du Manhattan en 1977), Didier Lestrade (journaliste et cofondateur d’Act Up-Paris), Tim Madesclaire (accompagnateur en santé sexuelle au SPOT Beaumarchais de AIDES ) ou encore Tarik Safraoui, membre du collectif Les Inverti·e·s.

    « Il faut arrêter de penser que nous [les pédés] appartenons à la catégorie de la masculinité hégémonique. Nous continuons à être considérés comme des masculins subalternes », souligne Guari, militant pour les droits des migrant·e·s dans un des épisodes. De son côté, dans une interview accordée au média queer Friction (qu'il a co-fondé), Camille Desombre revient sur le sens politique de l’usage du mot « pédé » par les personnes concernées : « Pour moi, revenir au mot pédé, c’était pas forcément se couper des autres communautés, mais réaffirmer une subjectivité spécifique à partir de nos expériences, et des formes de violences spécifiques que pédé implique, et se demander quoi faire à partir de cette position. Je vois que depuis quelques années, il y a une vraie remobilisation et réinvestissement de ce mot de la part de pédés qui, avant, ne l’employaient pas, qui ont envie de faire des choses avec ».

    Un épisode entier est consacré aux relations entre la police et les homosexuels masculins. Camille Desombre explique ce parti pris dans son interview à Friction : « En tant que pédés, il est important de savoir qu’il y avait une répression très spécifique de l’homosexualité masculine, une répression qui concerne à 99 % des hommes. Cette histoire a longtemps été passée sous silence, beaucoup d’entre nous ne la connaissent pas. J’avais aussi envie de parler de l’homonationalisme de la façon la plus concrète possible, de notre rapport à l’État, à l’ordre répressif et de comment on commence à se faire absorber par cela. C’était selon moi un bon angle pour interroger la façon dont on bascule de « fléau social » à « une minorité à protéger » ».

    Les quatre épisodes sont disponibles en podcast sur le site et l’appli de France Culture

    Le petit guide du coming out

    Lecture utile. Xavier Héraud, journaliste et photographe indépendant, spécialisé en presse LGBT (Ex Têtu, Yagg, Hornet, actuellement Strobo) sort un nouveau livre, Le petit guide du coming out, aux Éditions First, le 6 juin prochain. L’ouvrage propose un recueil d’infos, de conseils et de témoignages sur la thématique du coming out. Il s’adresse tout autant à celles et ceux qui envisagent de dévoiler leur orientation sexuelle ou leur identité de genre qu’aux personnes susceptibles de recevoir cette parole: parents, amis-es, collègues, etc. « Faire son coming out (ou ses coming outs, puisqu’on le fait quasiment toute sa vie) est toujours un moment particulier pour une personne LGBTQIA+. Or, si les représentations et la visibilité des minorités sexuelles ou de genre ont considérablement progressé ces 25 dernières années, il n’y a pas d’école ou de cours pour apprendre à être homo, bi, trans, intersexe ou autre. Il faut aller glaner les infos dont on a besoin à droite et à gauche et souvent avancer à tâtons. Il y a, aujourd’hui, pas mal d’infos sur le web, mais encore faut-il savoir où les trouver. Dès lors, le soutien communautaire et la transmission des expériences par les personnes concernées restent essentiels. C’est en quelque sorte ce principe qui guide ma vie professionnelle, militante et artistique depuis toujours. Ce Petit guide du coming out en est j’espère une nouvelle illustration », explique le journaliste sur son site web. Si vous êtes en région parisienne, l’auteur sera à la librairie LGBT+ Les Mots à la bouche, pour présenter et signer son livre le vendredi 7 juin à 19h.

    Le petit guide du coming out, aux Éditions First, le 6 juin prochain (160 Pages, 4,50€)

    LIVRE COMING OUT

     

    VIH : une exposition virtuelle sur les 30 ans de luttes d'Exaequo à Bruxelles

    L'exposition en ligne « toujourspas.exaequo.be », qui retrace 30 ans de lutte contre le sida au sein de l’association Ex Æquo (Bruxelles), a été inaugurée le 2 mai dernier. L'occasion de mettre en lumière les évolutions pour les personnes vivant VIH, autant que les discriminations auxquelles elles font encore face, explique l’agence de presse Belga. Documents, photos et vidéos retracent les étapes marquantes du travail d'Ex Æquo « pour la santé des hommes ayant des rapports sexuels avec d'autres hommes ». Le titre de l'exposition fait référence à la difficulté d'accès à la santé encore existante pour les personnes LGBTQ+. « Un coming out médical est encore souvent nécessaire, et expliquer notre mode de vie suppose de s'exposer à un possible jugement. De nombreuses personnes queer préfèrent ainsi cacher leur orientation sexuelle aux professionnels de santé », a expliqué le président de l'ASBL Pablo Sanz Moreno, cité par Belga. À cette difficulté s'ajoute, pour les personnes vivant avec le VIH, d'être parfois confrontées dans le monde médical à des peurs « venant d'un autre âge ». « On ne le répètera jamais assez. Une personne sous traitement dont la charge virale (…) est indétectable, ne transmet pas le virus », a rappelé l'association. Le lancement de cette exposition a aussi été l’occasion de pointer le manque de financements publics : « Quand 43 % des contaminations au VIH sont encore le fait de relations sexuelles entre hommes en 2022, on regrette que les financements publics ne soient pas proportionnels », a conclu Pablo Sanz Moreno.

    BD : Fabrice Neaud en conférence à Lyon et en album

    Fascinant dessinateur, Fabrice Neaud s’est fait connaître avec la publication de son Journal dessiné en quatre volumes. Une œuvre atypique et remuante dont il est l’objet, puisque c’est sa vie personnelle qu’il retrace, explore, fouille et expose. En octobre dernier, l’auteur a publié aux éditions Delcourt, Le Dernier Sergent - Les guerres immobiles. Dans cet ouvrage, Fabrice Neaud continue de se raconter, lui auteur, homosexuel mal-aimé (y compris de lui-même), de parler de ses obsessions. La Bibliothèque de la Part-dieu (Lyon) recevra Fabrice Neaud le samedi 1er juin 2024 de 15 à 17 heures pour une rencontre. « Fabrice Neaud est sans conteste l'un des artistes les plus passionnants de sa génération, initiant avec l'écriture graphique de son Journal initié dès la fin des années 1990 aux éditions Ego comme X un travail remarquable d'écriture de soi qui recevra un accueil enthousiaste dans les médias et dans les galeries où son travail sera exposé, expliquent les organisateurs-rices de la rencontre. Le Journal raconte la vie du narrateur, artiste gay habitant une petite ville de province, qui sort la nuit pour faire des rencontres de hasard et qui tombe amoureux. L'homosexualité constitue un thème majeur dans son œuvre ». « Nous aurons plaisir à entendre parler Fabrice Neaud, notamment de son travail et de ses influences graphiques, son point de vue sur la bande dessinée comme médium et la façon qu'il a de se raconter par le dessin, lui auteur homosexuel mal-aimé avec ses obsessions mises à nu, dans une forme d'intimité souvent crue mais d'une radicale liberté », indique la Bibliothèque de la Part-dieu.

    Expo : "Epidémies, prendre soin du vivant" à Lyon

    Décidément les épidémies sont à la mode sous les cimaises, ces derniers temps. Après la grande exposition des Archives nationales, voici la plus récente, proposée par le musée des Confluences, à Lyon. L’exposition Épidémies, prendre soin du vivant a été conçue d’après un concept original du National Museum of Natural History, Smithsonian Institution de Washington. Elle traite notamment de la peste, de la variole, du choléra, de la  grippe de 1918, du sida (une épidémie dont l’expo rappelle qu’elle a vu les personnes touchées devenir des activistes de leurs droits et de leurs soins) et plus récemment de la Covid-19 (très peu traitée, ici)… Depuis des millénaires, les épidémies touchent les sociétés humaines ainsi que les autres espèces animales, cette exposition revient sur ces événements qui ont bouleversé la vie sur tous les continents. À travers des collections de médecine, d’ethnographie, des spécimens d’histoire naturelle ou encore des œuvres contemporaines, l’exposition fait apparaître les épidémies comme un phénomène non seulement biologique mais également social, explique le musée. Elle démontre aussi « à quel point santé humaine, santé animale et santé environnementale sont étroitement liées ».

    Musée des Confluences de Lyon, jusqu’au 16 février 2025. Du mardi au dimanche de 10h30 à 18h30. Nocturne jusqu'à 22h le 1er jeudi du mois. Entrée 12 euros pour les adultes. Plus d’infos.

    Livre : Treize films pour comprendre l'identité de genre

    Que peuvent bien avoir en commun des films aussi différents que Billy Elliot (2000), Certains l’aiment chaud (1959), Matrix (1999), Les Roseaux Sauvages (1994) ou encore Call Me By Your Name (2017) ? Ils traitent tous d’une façon ou d’une autre de l’identité de genre. C’est  pour cette raison qu’ils ont été choisis par un collectif d’auteurs-rices dans le cadre du livre « 13 films pour comprendre l'identité de genre », ouvrage sous la direction de Lionel Souche. Ce livre est publié dans la collection « La psychologie fait son cinéma » qui a pour ambition de comprendre un champ de la psychologie grâce au 7e art. Psychologues venus-es de nombreux champs, médecins sexologues et sociologues passent le thème transversal qu'est l'identité de genre au prisme du cinéma. Et chacun-e se saisit d'une notion clé afin d'illustrer les questionnements identitaires liés au genre que ce soit du point de vue du sujet, de l'identité personnelle, du rapport à la société, mais aussi du positionnement des professionnel-les en tant que thérapeutes. Cette collection de textes permet de (re)découvrir la transidentité avec la saga Matrix, la non-binarité à partir du drame A perfect family ou encore la fluidité du genre au travers de la comédie Trois nuits par semaine...

    Extrait du chapitre « Identité sexuée et orientation sexuelle » écrit par Patrick Papazian (médecin sexologue et rédacteur de la rubrique « Parlez-moi d’amour… et de sexe ! » dans Remaides) : « Miroir, parlons-en, car c'est un miroir qui joue le premier rôle dans la scène que j'ai choisie dans Les Roseaux sauvages. Posons le contexte : en 1962, dans le sud-ouest de la France, plusieurs adolescents se croisent, s'aiment, ou non, se cherchent, se mentent à eux-mêmes, ou pas. Il est urgent, voire vital, pour les jeunes protagonistes masculins du film d'affronter la vérité parfois mortelle, celle d'être potentiellement appelé à combattre dans la guerre d'Algérie, et d'interroger les notions de courage et de lâcheté. Avoir le cran de regarder l'homme que l'on est, ou que l'on souhaite être, en face. Le jeune François est attiré par Serge, avec qui il a partagé quelques jeux sexuels. Une nuit, vêtu de son pyjama à rayures un peu trop grand pour lui, François quitte son lit dans le dortoir du pensionnat, la caméra le suit dans la salle de bains commune. Dans l'obscurité de cet antre, matriciel, humide (la bande sonore comporte un robinet qui goutte, entêtant), François commence à prononcer, à voix basse, quatre mots : « Je suis un pédé ». La caméra montre son reflet dans le miroir, pendant qu'il répète, comme une litanie : « Je suis un pédé » ».

    Lionel Souche est psychologue clinicien à Lyon, psychothérapeute, formateur et chargé de cours auprès des Universités Lumière Lyon 2, UCB Lyon 1 et EPP Lyon. La liste des auteurs-rices qui ont contribué au livre comprend : François-David Camps, Aurélie Collard, Federico Ferrari, Eric Feugé, Romuald Géroudet, Maïly Gros, Mélanie Jacquot, Aurélien Lubienski, Jean-Baptiste Marchand, Nicolas Mendes, Benoît Monchotte, Fanny Poirier, Patricia Mercader, Jonathan Nicolas, Patrick Papazian, Delphine Rambeaud-Collin, Yann Zoldan.

    13 films pour comprendre l'identité de genre, 13 euros (Éditions In Presse, Collection La psychologie fait son cinéma).