États généraux des personnes vivant avec le VIH : 160 personnes vivant avec le VIH interpellent les pouvoirs publics
- Actualité
- 05.06.2024
© Nina Zaghian
Par Fred Lebreton
EGPVVIH 2024 : 160 personnes vivant avec le VIH interpellent les pouvoirs publics
C’est un évènement ! Les États généraux des personnes vivant avec le VIH (EGPVVIH 2024), les premiers depuis 20 ans, se déroulaient du 25 au 27 mai à Paris. La rédaction de Remaides était sur place et retrace les moments forts. Le troisième épisode revient sur la plénière de clôture et la restitution des recommandations par et pour les personnes vivant avec le VIH.
« Sérorité »
Lundi 27 mai 2024, 9h30 au ministère du Travail, des Solidarités et de la Santé. La salle Laroche se remplit. La nuit a été encore très courte. Il fallait prendre le petit déjeuner à 6h30 et se retrouver à 7h30 devant l’hôtel pour prendre le bus (à 8h), direction le ministère. Cette matinée commence par une plénière de clôture des États généraux des personnes vivant avec le VIH : un moment pour se dire au revoir. Un duo de choc arrive sur scène pour chauffer la salle, Camille Spire (présidente de AIDES) et Thibaut Vignes (directeur des Petits Bonheurs) : « On avait une petite animation prévue avec Wifi, mais même le ministère a des problèmes de Wifi, ça nous rassure », commente avec humour Thibaut.
L’animation en question se fait donc en direct avec la salle. « On voulait un peu vous sonder pour que vous puissiez nous résumer votre week-end en un seul mot ». De nombreuses mains se lèvent et les mots fusent : « Enrichissant ; émotions ; combats ; espoirs ; détermination ; ensemble ; amour ; force ; joyeux ; cohésion ; survivant ; continuer ; réconfortant ; fierté ; émotions ; liberté ; solidarité ; avancer ; courage ; combattant ; organisation ; inouï ; YES WE CAN ; optimiste ; histoire ; résilience ; partage ; ambiance ; interassociatif ;persévérance ; intense ; bienveillance ; écoute ; patience ; énergie ; nouvelle histoire ; diversité ; minute de silence ; excitation ; lutte ; politique ; communautés ; renaissance ; recommandations ; santé de la femme ; non jugement ; VIH ; protection ;souvenirs ; merci ; vivantes ; positivité ; rencontres ; debout, unité ; AIDES ; Sidaction ; en vie », etc. Le mot « sérorité » est prononcé. Jolie création qui mélange séropositivité et sororité (solidarité entre femmes).
Une « transmission mélancolique »
Prochaine séquence, Tim, accompagnateur communautaire au Spot Beaumarchais (Paris) et personne vivant avec le VIH, monte sur scène pour commenter les recommandations à destination des communautés des PVVIH. Le militant cite un verbatim entendu lors du week-end : « Lors de ma pause, je m'enfermais dans les toilettes pour prendre mon médicament. J'étais dans un état de stress pas possible ». Tim rebondit : « En fait, ça rappelle quelque chose que j'ai vécu dans les années 90. À l'époque, il n'y avait pas de traitement efficace encore. Il y avait d'autres traitements qui étaient bien plus brutaux. Et notamment, il y en avait un qui s'appelait la DDI, une espèce de gros cachet qu'il fallait dissoudre dans de l'eau et prendre un quart d'heure avant de manger. Ça avait un goût absolument dégueulasse. Moi, je travaillais à l'époque en tant que journaliste et, souvent, je faisais des allers-retours en province en avion, donc, je n'avais pas forcément le temps de prendre le médicament à l'heure dite. Et je me souviens que, bien des fois, j'ai mangé mon cachet de DDI à sec, dans un train ou un avion. Je me suis dit, waw, on a fait un long chemin. Mais c'est vrai que j'étais dans un état de stress pas possible. Et bizarrement, je ne me rendais pas tellement compte de ça. J'étais plutôt content d'avoir un traitement même s’il était un peu lourd », raconte le militant.
Autre sujet évoqué par Tim, les représentations datées du VIH/sida y compris dans nos discours aujourd’hui : « Ça me tient énormément à cœur. Les représentations anciennes, c'est quelque chose que j'ai réalisé quand je faisais beaucoup d'accompagnement Prep et que j'entendais de la part de garçons qui avaient 20 ans, 25 ans, 30 ans, qui me ressortaient des narratifs qui étaient exactement ceux qu'on entendait dans les années 90. C'est-à-dire un sens du drame, une espèce de tension de vie qui était totalement démesurée avec la situation qu'ils vivaient. Je me suis toujours dit à ce moment-là que, quelque part, dans la transmission qu'on a faite de nos expériences passées, on a transmis un stress qui n'est plus l'actualité. On fait une sorte de transmission mélancolique de ce qu'on a vécu. Et cette transmission mélancolique, souvent, elle nous empêche de faire des bons constats pour aujourd'hui. Il faut un petit peu s'en méfier ». Et le militant, diagnostiqué séropositif en 1986, de s’adresser à ses pairs-es : « Il faut transmettre la mémoire mais sans faire un poids trop lourd qui bloque les gens derrière nous. Et ce message s’adresse à ma génération, c'est extrêmement important ».
Parmi les recommandations à destination des associations, l’importance et la valorisation de l’accompagnement communautaire : « Il faut remettre en place les programmes de maintien à domicile. Parce que c'est vrai que tout le monde dit que le service à la personne, c'est un métier d'avenir, qu'on va en avoir besoin, mais quand on voit comment sont traités ces professions-là, on est absolument ébahis », déplore Tim.
Ce premier temps se termine par la lecture d’un texte écrit et lu par Jean-François Laforgerie, le rédacteur en chef de Remaides.
« Nous nous sommes dit qu'il était temps de reprendre la parole et de la faire entendre »
Après la pause-café, la seconde partie de la matinée débute avec la restitution des recommandations. Florence Thune, directrice générale de Sidaction, et Christophe Martet, président de Paris sans sida, introduisent la table ronde : « En 2017, au moment où sortait le film 120 battements par minute, une très grande partie des acteurs et actrices politiques, jusqu'au plus haut sommet de l'État, n'ont eu de cesse de rappeler à quel point les militants de cette époque étaient des héros. Depuis, les héros qui ont survécu à ces années terribles, dont beaucoup ont eu des parcours de santé et de travail chaotiques, ont été remerciés par une dégradation de leurs droits sociaux, par des temps d'indemnisations plus courts dans leur période de chômage, et par un recul de la date à laquelle ils-elles pourront profiter de leur minimum vieillesse. Alors, à l'heure où on nous laisse entendre que le VIH, ce n'est plus un problème, que tout n’est que luxe, calme et volupté, nous nous sommes dit qu'il était temps de reprendre la parole et de la faire entendre », déclare Florence Thune.
« Je préfère me présenter en tant que pédé et séropo »
Chrisophe Martet prend le relai : « Je suis gay et personne vivant avec le VIH, mais je préfère me présenter en tant que pédé et séropo. Pour garder la charge symbolique de ces mots, pour ce qu’ils disent de l'histoire de cette épidémie faite de beaucoup de rejets, pour repolitiser nos luttes, comme ça a été dit pendant ces États généraux. Cela fait 40 ans que je vis avec le VIH, une vie riche de rencontres, d'amour, je pense à mon mari Solo, d'obstacles, d'échecs et de victoires. Il n'y a pas que le VIH dans ma vie, dans notre vie, comme ça a été dit souvent pendant ces États généraux, pendant ces deux jours, mais le VIH est là, et je vieillis avec. Cela fait vingt ans qu'il n'y a pas eu un tel événement, et je veux vraiment remercier AIDES, Sidaction et tout le comité d'organisation pour avoir réussi à réunir des personnes vivant avec le VIH aussi diverses. Des hommes et des femmes, cisgenres et trans, gays et hétéros, beaucoup de personnes noires, des personnes venant de tous les territoires, dont les DOM-TOM, des personnes de tous les âges, etc.
J'ai été frappé et ému par le fait que des personnes très récemment infectées participent à ces États généraux. Je leur souhaite, ainsi qu'à tous les participants, une longue et belle vie. Alors, ce que j'ai aimé entendre pendant ces États généraux, c'est quelqu'un qui a dit : « Nos échanges me montrent que je ne suis pas seul. Une autre personne a dit : « Je ne pensais pas atteindre 60 ans ». Ce qui m'a rendu triste et en colère, c'est quelqu'un qui a dit : « J'ai eu huit ans d'allocation adulte handicapé et aujourd'hui, c'est autant d'années perdues à la retraite ». Ou quelqu'un qui a dit : « À l’annonce de ma séropositivité, j'ai voulu me jeter d'un pont ».
Le président de Paris sans sida souligne l’absence remarquée de Catherine Vautrin, la ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités et celle de son ministre délégué à la Santé, Frédéric Valletoux (voir encart 2) : « On me dit dans l'oreille que la ministre de la Santé n'est pas là et que le ministre délégué n'est pas là non plus. Super… Donc, visiblement, les personnes vivant avec le VIH, ça ne les intéresse pas beaucoup. Mais, il y a des gens très bien qui sont là ».
Huit personnes vivant avec le VIH sur scène pour la restitution
Moment très fort de cette plénière de restitution avec la table ronde qui réunit huit personnes vivant avec le VIH. Ces participants-es ne savaient pas encore 48h avant qu’ils-elles allaient se retrouver sur l’estrade du ministère de la Santé pour représenter leurs pairs-es. Ils-elles ont courageusement accepté de le faire à visage découvert.
- Jean-Michel :
« Je suis de Guadeloupe et j’ai 29 ans de cohabitation avec le VIH (…) Les personnalités publiques, politiques, religieuses, policières, judiciaires, ont une responsabilité dans le changement de mentalité, la lutte contre la sérophobie et la diffusion des bonnes nouvelles comme le Tasp ou la Prep. Pour cela, elles doivent être formées, sensibilisées et influencées (…). Les personnes vivant avec VIH qui vivent dans les départements et régions d'outre-mer demandent à ce que les moyens alloués à la lutte contre le VIH soient à la hauteur de l'équilibre dans ces territoires. Aujourd’hui, ils sont loin d'être à la même hauteur ».
- Candida :
« Je suis de Marseille et j'ai 41 ans de cohabitation avec le VIH (…). À l'annonce de ma séropositivité, en 1983, le médecin m'a dit que je serais morte dans trois mois. Aujourd’hui, j’ai 60 ans, je suis bien vivante, je suis mariée et j'ai trois magnifiques enfants (…) En 2020, pendant la naissance de mon troisième enfant, j'ai été obligée de sortir de la maternité, pieds nus et en pyjama, parce que mon médecin n'était pas là, et mon autre médecin voulait que je fasse une césarienne ; Et moi, en charge virale indétectable, je voulais accoucher par voie basse. La médecin a insisté pour faire une césarienne. J'ai refusé et je suis partie en courant (…). Il y a juste deux semaines, j'ai fait un scanner. L'infirmière était en train de me mettre la perfusion. Elle me demande : « Est-ce que vous avez quelque chose, par exemple, le sida ? ». Moi, je la regarde et je lui dis : « Non, je n'ai pas de sida, mais j'ai le VIH ». Elle enlève la main, met deux gants et devient toute blanche. Je me suis demandé ce qui se passait ? Et j’ai passé 30 minutes à faire de l'éducation thérapeutique sur le VIH à cette infirmière. C'est inadmissible. Ça, il faut que ça s'arrête ! ».
- Raphaël :
« Je vis avec le VIH depuis 13 ans (…) Ce n'est pas vraiment moi qui ai découvert ma séropositivité, c'est ma mère. La première phrase qu’elle m’a dite a été « Qu'est-ce que tu as fait de ta vie ? » J'ai toujours gardé cette phrase avec moi, pour me rappeler que j'ai choisi de me battre, et que, jusqu'à aujourd'hui, le fait d'avoir le VIH n'a rien changé dans ma vie. Au contraire, ça m'a donné encore plus de force pour prendre soin de moi et faire plus de bonnes choses dans ma vie. Ce que j'aimerais pour l'avenir, c’est que les personnes jeunes comme moi, quand j'ai découvert ma séropositivité à l’âge de 17 ans, puissent avoir les informations nécessaires pour qu'elles ne soient pas contaminées. Et en cas de contamination, qu'elles puissent avoir un suivi digne et respectueux. Il y a deux mois, mon médecin traitant qui sait pourtant que je vis avec le VIH m’a redemandé un dépistage pour le VIH. Il a aussi dit que j’avais fait exprès de propager le VIH et de contaminer d'autres personnes. C'est très dur d'entendre ça ».
- Anne-Lydie :
« Je suis de Montpellier et ça fait 24 ans que je vis avec le VIH (…) Les personnes qui vieillissent avec le VIH âgés sont arrivées à la retraite, fort heureusement. Nous souhaitons que les conditions d'accès à la retraite pour les personnes vivant avec le VIH soient adaptées. Par exemple, on pourrait prendre en compte les dix meilleures années. On pourrait prendre en compte aussi les pertes de trimestre liées au VIH, parce que quand on a été malade au long de sa vie, qu'on a eu des arrêts maladie plus ou moins longs, on arrive à la retraite et on se retrouve avec pas grand-chose. Et puis, on souhaiterait aussi que des espaces de repos et de vie pour les personnes vivant avec le VIH soient créés, pour ces personnes âgées, qui sont souvent mises de côté, maltraitées. Une personne de ce week-end a dit « Quand tu arrives à la retraite, et que tu as eu un mi-temps thérapeutique, comme c'est mon cas, il te manque des trimestres, et ta pathologie est punitive. » Ça, on aimerait plus l'entendre » (…). Je ne souhaite qu’une chose, c'est de pouvoir devenir visible sans peur et sans me sentir nuisible ».
- Cédric :
« J'ai 36 ans et ça fait maintenant huit ans que je suis contaminé par le VIH (…). Durant ce week-end, on a pu entendre une personne dire : « J’ai entendu une infirmière dire : « Comment ça se fait qu'il est contaminé alors qu'aujourd'hui il y a tout ce qu'il faut ? ». À titre personnel, quand on parle de refus de soins, ça me fait écho, puisque moi, il y a tout juste deux ans, un dentiste a refusé de me soigner. Je me suis senti humilié puisqu'il m'a fait sortir de son cabinet devant la salle d'attente en disant à haute voix : « Je ne m'occupe pas de personne atteintes de VIH » (…) À l'issue de ces États généraux, il est vraiment temps qu'on mette en place des actions à destination des pouvoirs publics et des professionnels de santé, pour qu'enfin, la honte change de camp, et qu'elle vous revienne à eux, et non à nous ».
- Berthe :
« Ça fait quatre ans que je vis avec le VIH (…) Après ce week-end, je me sens rassurée, affirmée, et j'ai envie d’assumer le VIH partout. Je vous le dis, avec ou sans VIH, on est avant tout des êtres humain ».
- Lydienne :
« Je suis d'origine camerounaise et ça fait 24 ans que je vis avec le VIH (…) J'ai failli essuyer un refus lors du dépôt de mon dossier de demande d'étranger malade à la préfecture, pour la simple et unique raison que la personne qui m'a accueillie pensait que je ne connaissais pas les délais de dépôt de dossier. Si je ne les avais pas connus, elles ne me les auraient pas rappelés et je n'aurais pas pu déposer mon dossier. Nous demandons que les pouvoirs publics s'assurent de l'accès effectif des traitements dans nos pays d'origine avant de nous « servir » des refus de titre de séjour pour étrangers malades. Aux associations, nous vous prions, s'il vous plaît, de vous appuyer sur vos réseaux de partenaires dans nos pays d'origine pour documenter les difficultés d'accès aux traitements auxquelles nous faisons face chez nous » (…) Des personnes ont vieilli avec le VIH, heureusement. Et parce qu'on vieillit avec le VIH, il y a plusieurs questions qui ont été soulevées par nos aînés, les héros de cette lutte, ceux qui ont survécu avec 30 ans, 40 ans de VIH. Alors, nous, ensemble, jeune et ancienne générations, nous demandons qu’il nous soit garanti l’accès à l’assurance vie en cas de décès. Quand on sera morts, qui paiera nos obsèques ? (…). Je suis arrivée en France parce que je n’avais pas le soin qu'il fallait chez moi. Et je fuyais la discrimination. Je ne voudrais pas fuir la France à cause de la discrimination. Alors, les mêmes moyens qui ont été utilisés pour diaboliser le sida dans les années 80, le même matraquage qui a été mis en place pour dire que le sida tue, ces mêmes outils de communication, de publicité devraient être mis en place pour dire qu’on vit bien avec le VIH aujourd’hui, on vieillit, on fait les enfants, on travaille, sans que cela ne pose problème à notre voisin. On n'a pas le droit de nous discriminer. Aujourd'hui, en 2024, à cause du VIH ».
- Denis :
« Cela fait 40 ans que je vis avec le VIH, l'ennemi, l'envahisseur et maintenant, j'ai envie de rectifier quelque chose. Durant ces sensationnels États généraux, j'ai réalisé que j'ai la chance de faire partie de la première génération de personnes vivant avec le VIH, à laquelle il est offert la possibilité de mourir de vieillesse. Après de multiples combats, hélas, pas tous gagnés encore. On m’a dit : « Ne vous plaignez pas monsieur, vous êtes vivant ! ». Oui, en effet, à l'époque, je ne me suis pas plaint. J'étais vivant. Nous avons donc balisé le chemin pour les générations suivantes. « Ne vous plaignez pas, monsieur des effets secondaires, vous êtes vivant ! ». Eh bien, non. Maintenant, je dis stop. Ça suffit ! Défrichons un nouveau territoire, celui de la qualité de vie avec le VIH à long terme, jusqu'à la victoire ».
Lundi 27 mai 2024, 12h30 au ministère de la Santé. La salle Laroche se vide. Les yeux sont un peu mouillés. Un mélange d’émotions et de fatigue accumulées. C’est le moment de se dire au revoir, de récupérer ses bagages, de se diriger vers le métro pour prendre le train, voire l’avion pour certains-es participants-es. On s’embrasse, on se dit « à bientôt », certains-es échangent leur 06, d’autres échangent leur @ Instagram. Comme une envie commune de rester en contact et de prolonger ce week-end, cette bulle confortable où on a pu se livrer en toute sécurité. Quelque chose s’est passé pendant ces trois journées et maintenant il faut garder le cap. Une participante d’origine camerounaise me serre dans ses bras. On s’était déjà vus un an auparavant au week-end de la Disance à Paris : « On est ensemble » me dit-elle les yeux humides. « Ensemble, on est plus forts-es ».
Qui a participé aux États généraux des personnes vivant avec le VIH ?
Qui sont les 160 participants-es des États généraux des personnes vivant avec le VIH ? Un petit questionnaire socio-démographique anonyme et facultatif était proposé à l’entrée de l’évènement samedi. Il permet de donner une photographie des participants-es. Concernant le pays de naissance, 54 % des répondants-es sont nés-es en France métropolitaine et 26 % en Afrique sub-saharienne. Les trois régions de France les plus représentées sont l’Île-de-France (39 % des participants-es) puis l’Auvergne-Rhône-Alpes (14 %) et la Provence-Alpes-Côte d'Azur. La majorité des répondants-es sont dans la tranche d’âge 50-78 ans (58 %) puis la tranche 26-49 ans (37 %) et une minorité de la tranche de 18-25 ans (5 %). Une certaine parité dans le genre des participants-es : 54 % d’hommes cis, 43 % de femmes cis, 1 % de femmes trans et 1 % de personnes non-binaires. Même parité en ce qui concerne l’orientation sexuelle avec 44 % de personnes hétérosexuelles, 43 % de personnes homosexuelles et 8 % de personnes bisexuelles. On peut souligner une majorité de personnes diagnostiquées séropositives il y a plus de 20 ans (49 %) et seules 12 % de personnes diagnostiquées entre cinq et dix ans. Enfin, 58 % des répondants-es étaient membres bénévoles ou salariés-es d’une association VIH, 32 % en contact avec une association sans en faire partie et 10 % sans lien avec une association.
Le « silence assourdissant du ministère de la Santé »
L’absence remarquée de Catherine Vautrin, la ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités et de son ministre délégué à la Santé, Frédéric Valletoux, a été largement commentée à la sortie de l’évènement par des participants-es, mais aussi sur X (ex Twitter) : « Présent ce matin aux États Généraux des personnes vivant avec le VIH. L’occasion d’entendre des témoignages utiles et poignants des personnes séropositives et des associations, si souvent invisibilisées. Honte au gouvernement, qui a brillé, par son absence ! », a commenté Andy Kerbrat, député LFI de la 2e circonscription de Loire-Atlantique. De son côté, Florence Thune, directrice générale de Sidaction, a partagé sa colère : « Restitution ce matin des États généraux des personnes vivant avec le VIH. Des témoignages forts sur les multiples discriminations encore vécues aujourd’hui. Ne comptons que sur nous-mêmes pour les combattre. Silence assourdissant du ministère de la santé ». « Aux États généraux de personnes vivant avec le VIH, aucun ministre dans la salle, mais des prérecommandations sur la table », a titré Éric Favereau dans son article sur l’événement pour Libération (28 mai).
Les principales recommandations des EGPVVIH 2024
Les participants-es aux États Généraux des personnes vivant avec le VIH réclament que soient appliquées les recommandations suivantes par les professionnels-les de santé :
- Assurer un parcours de soins complet et une prise en charge globale des personnes vivant avec le VIH (santé mentale, conditions de vie ou habitat, maladies liées ou non au VIH, effets indésirables, non jugement, bilan global annuel, traitements, etc.).
- En associant les personnes vivant avec le VIH, améliorer la coordination des parcours de santé dans une approche pluridisciplinaire et assurer une communication efficace entre les différents professionnels-les de santé aux bénéfices des personnes.
- Garantir une formation continue et une montée en compétences de l’ensemble des professionnels-les de santé sur le VIH pour lutter contre la sérophobie dans le milieu médical et paramédical et à tous les intervenants-es dans le parcours de santé (médiateurs-rices, kinésithérapeutes, psychologues, etc.).
- Compte tenu des forts besoins exprimés par les personnes vivant avec le VIH, la formation des professionnels-les de santé à l’annonce du diagnostic doit être renforcée et la santé mentale pleinement intégrée à la prise en charge globale.
- Prendre en compte les comorbidités liées au vieillissement, les pathologies associées et les antécédents médicaux dans la prise en charge des personnes vivant avec le VIH.
Les participants-es aux États Généraux des personnes vivant avec le VIH formulent également les revendications suivantes, à destination des décideurs-ses politiques :
- Développer et mettre en œuvre des politiques de lutte contre les discriminations dont font l’objet les personnes vivant avec le VIH (sérophobie, homophobie, transphobie, racisme, etc.).
- Créer un observatoire des refus de soin, du non-respect du secret médical et, plus largement, des discriminations dans différents domaines (emploi, école, etc.).
- Réduire les inégalités territoriales dans les offres de soin et le suivi des parcours en santé des personnes qui vivent avec le VIH.
- Pour garantir l'accès aux soins des étrangers-ères malades, le dossier de demande de séjour pour soin doit être apprécié par le Ministère de la santé et non par le Ministère de l'intérieur.
- Développer des politiques favorables aux conditions de vie et de vieillissement des personnes vivant avec le VIH (déconjugalisation des aides sociales à l’exemple de l'AAH, instauration de l’AAH à vie des plus de 50 ans, maintien dans l’emploi, calcul spécifique compensatoire pour les pensions de retraite, accès et maintien dans un logement, etc.)