La science à l'appui de la justice : mettre fin à la criminalisation du VIH dès maintenant
- Communiqué
Militants, personnes vivant avec le VIH, et organismes de défense des droits humains saluent la publication d’une Déclaration de consensus d’experts en VIH pour une application du droit criminel fondée sur la science plutôt que les peurs irrationnelles.
Voici les points clés de cette Déclaration :
• La prise en compte des données scientifique est essentielle pour éviter les erreurs judiciaires.
• La possibilité de transmission du VIH associée à un rapport sexuel vaginal, oral ou anal varie de faible à nulle.
• Il n’y a pas de possibilité de transmission associée à un rapport sexuel vaginal, anal ou oral quand un préservatif intact a été utilisé correctement.
• Il n’y a pas de possibilité de transmission associée à un rapport sexuel vaginal, anal ou oral lorsque le partenaire séropositif a une charge virale indétectable.
• Il n'y a aucune possibilité de transmission du VIH par contact avec la salive même si celle-ci contient un peu de sang.
• Le VIH est une maladie chronique gérable sous condition d’accès aux traitements.
• L’analyse phylogénétique ne permet pas de prouver qu’une personne a transmis le VIH à une autre, mais elle peut disculper un accusé.
Amsterdam, 25 juillet 2018 — 20 des plus grands scientifiques internationaux du VIH, dont Françoise Barré-Sinoussi, publient une déclaration de consensus sur le virus et sa transmission, destinée aux acteurs de la justice.
La Déclaration a reçu le soutien de la Société internationale du sida (IAS), de l’International Association of Providers of AIDS Care (IAPAC), du Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA) et de plus de 70 éminents scientifiques de 46 pays différents. La Déclaration est publiée dans une revue soumise à l’examen des pairs, le Journal of the International AIDS Society (JIAS), pendant le 22e Congrès international sur le Sida.
La Déclaration a été rédigée pour aider les experts scientifiques appelés à témoigner dans des affaires criminelles contre des personnes vivant avec le VIH. Elle vise aussi à encourager les gouvernements et les acteurs judiciaires à garantir une application du droit pénal fondée sur des données scientifiques.
Cette Déclaration a été élaborée dans un contexte de préoccupations relatives aux droits humains et à la santé publique : l’ONUSIDA, la Commission mondiale sur le VIH et le droit, le Comité de l’ONU pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes ainsi que le Rapporteur spécial des Nations Unies sur le droit à la santé, exhortent les gouvernements du monde entier à limiter strictement le recours au droit pénal contre les personnes vivant avec le VIH aux seuls cas de transmission intentionnelle. (Cas extrêmement rares où une personne connaissant son statut agit dans l’intention de transmettre le virus, et parvient à le transmettre).
«Nous, les militants, nous réclamions depuis longtemps un consensus clair des scientifiques sur le sujet, et nous sommes satisfaits du contenu de cette Déclaration, autant que de la diversité de ses signataires, ainsi que de l’accueil extrêmement positif qu’elle a reçu», a déclaré Edwin J. Bernard, coordinateur mondial du HIV Justice Network, secrétaire de HIV JUSTICE WORLDWIDE. «Des scientifiques de premier plan, venus de toutes les régions du monde, se sont unis pour lancer un cri d’alarme et demander justice.» A-t-il poursuivi avant de conclure : «Cette déclaration sera un outil de plaidoyer crucial pour faire enfin cesser l’odieuse criminalisation des personnes vivant avec le VIH.»
«Aux quatre coins du monde, des personnes vivant avec le VIH continuent d’être poursuivies alors qu’elles n’avaient aucune intention de faire du mal et n’ont pas transmis le VIH. Dans plusieurs cas, il n’y avait même pas de risque de transmission», affirme Cécile Kazatchkine, analyste principale des politiques au Réseau juridique canadien VIH/sida, partenaires de la campagne HIV JUSTICE WORLDWIDE. «De telles poursuites sont injustes – et la Déclaration de consensus d’experts publiée aujourd’hui confirme que le droit pénal va beaucoup trop loin.»
«J’ai pris toutes les mesures de protection possibles: j’ai travaillé avec mon médecin pour avoir une charge virale indétectable et j’ai utilisé des préservatifs. Mais aux yeux de la loi, tout ce qui compte, c’est si j’ai dévoilé ou pas ma séropositivité. Je suis actuellement en prison où je purge une peine de 30 ans de réclusion» commente Kerry Thomas, membre du conseil d’administration du Sero Project.
«Au lieu de les protéger, la criminalisation expose les femmes qui vivent avec le VIH à un risque accru de violence, de maltraitance et de poursuites», ajoute Michaela Clayton, directrice générale de l’AIDS and Rights Alliance for Southern Africa (ARASA). «La communauté scientifique a parlé : le système de justice pénale, les législateurs et les dirigeants politiques doivent prendre en considération l’impact des poursuites sur les droits fondamentaux des personnes vivant avec le VIH.» Avant de conclure : «Selon différents facteurs économiques, ethniques, ou culturels, l’accès aux traitements ainsi que la capacité de négocier l’utilisation d’un préservatifs peuvent être limités. Celles et ceux qui font face à ces limites ont moins de chances d’être traités équitablement par la justice, les médias ou le système de santé. La science seule ne suffira pas à faire disparaitre la criminalisation : le combat continue.»
Pour lire la version intégrale de la Déclaration de consensus d’experts, consultez le Journal of the International AIDS Society à https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1002/jia2.25161 (à compter de 15 h GMT+2).
HIV JUSTICE WORLDWIDE est un mouvement international qui vise à influencer les discussions concernant la criminalisation du VIH, à partager de l’information et des ressources, à favoriser le réseautage et le renforcement des capacités, à mobiliser un plaidoyer et à cultiver une communauté transparente et collaborative. Il est dirigé par un Comité d’orientation composé de dix partenaires – AIDS Action Europe, AIDS-Free World, AIDS and Rights Alliance for Southern Africa (ARASA), le Réseau juridique canadien VIH/sida, le Réseau mondial des personnes vivant avec le VIH (GNP+), HIV Justice Network, la Communauté internationale des femmes vivant avec le VIH (ICW), Southern Africa Litigation Centre (SALC), Sero Project et Positive Women’s Network - USA (PWN-USA) – et il compte actuellement de plus de 80 organismes membres à l’échelle internationale.
CONTACT PRESSE : Janet Butler-McPhee, on behalf of HIV JUSTICE WORLDWIDE jbutler@aidslaw.ca +1 647-295-0861 www.hivjusticeworldwide.org