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    L’Actu vue par Remaides : « Croi 2025 : deux nouveaux cas de rémission VIH »

    • Actualité
    • 11.03.2025

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    Des oratrices et orateurs lors d'une conférence de presse à la Croi 2025, à San Francisco.
    Photo : Fred Lebreton

     

    Par Bruno Spire, Luis Sagaon-Teyssier et Fred Lebreton

    Croi 2025 : deux nouveaux cas
    de rémission du VIH

    La plus grande conférence scientifique américaine sur le VIH, les hépatites et les infections opportunistes (Croi) se tient à San Francisco (États-Unis) jusqu’au 12 mars 2025. Comme chaque année, la rédaction de Remaides vous propose une sélection des temps forts et des infos clefs de cet événement scientifique. Retour sur la journée du lundi 10 mars 2025.

    C’est désormais une tradition, voire un passage obligé, à chaque conférence internationale, un nouveau cas de rémission VIH est annoncé. La Croi 2025 n’y échappe pas ; avec ― bonus, cette année ― non pas un, mais DEUX nouveaux cas. Ce qui fait un total de dix cas de rémission du VIH dans le monde (voir notre article en janvier dernier sur le huitième cas, une femme suivie à Marseille, en France.

    Rémission prolongée du VIH, malgré un rebond transitoire après une greffe de cellules souches

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    Paul Rubinstein (Université de l’Illinois, Chicago, États-Unis) a présenté un des deux cas de rémission du VIH annoncés lors de l'édition 2025 de la Croi. Photo : Fred Lebreton

    Le premier cas présenté lundi 10 mars en conférence de presse par Paul Rubinstein (Université de l’Illinois, Chicago, États-Unis) concerne un homme de 67 ans vivant avec le VIH et atteint de leucémie myéloïde aiguë (un type de cancer du sang fréquent). Cet homme a reçu une greffe de moelle osseuse d’un donneur porteur d’une mutation génétique rare, CCR5∆32/∆32, connue pour bloquer l’entrée du VIH dans les cellules. Après la greffe, son système immunitaire a été entièrement remplacé par celui du donneur, et les traces de VIH dans son sang sont devenues indétectables. Un an après la greffe, ses anticorps anti-VIH avaient chuté à des niveaux similaires à ceux de personnes jamais infectées. Lors d’un premier arrêt du traitement antirétroviral, le virus a brièvement réapparu dans son sang (probablement à partir du réservoir viral), avant que son système immunitaire ne l’élimine, ce qui est inhabituel. Même après cette réactivation temporaire du VIH, aucune trace du virus n’a été détectée dans ses cellules immunitaires. Un second arrêt du traitement, 24 mois plus tard, a permis d’observer une rémission du VIH, qui dure depuis au moins sept mois. Ce cas unique suggère que la réapparition temporaire du virus après une greffe avec cette mutation ne signifie pas forcément un échec de l’éradication et ouvre de nouvelles perspectives pour la recherche d’un traitement curatif contre le VIH.

    Rémission du VIH après une greffe de cellules souches à Oslo

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    Marius Trøseid (Oslo University Hospital, Oslo, Norvège) a présenté le second cas plus "classique" de rémission du VIH. Il concerne un patient européen. Photo : Fred Lebreton

    Le second cas plus « classique » a été présenté par Marius Trøseid (Oslo University Hospital, Oslo, Norvège). Il concerne un homme de 58 ans, vivant avec le VIH depuis 14 ans. Rien de bien nouveau dans ce cas qui est très similaire aux autres. Il est en rémission depuis quatre ans après avoir reçu une greffe de cellules souches pour traiter une maladie du sang. Le donneur, son frère, portait une mutation génétique rare (CCR5Δ32/Δ32) qui empêche le VIH d’infecter les cellules. Cette mutation a probablement joué un rôle clé dans la rémission, empêchant le virus de reprendre après la greffe. De plus, le patient a développé une réaction immunitaire post-greffe (maladie du greffon contre l’hôte), qui pourrait avoir contribué à l’élimination du virus, notamment dans les tissus de l’intestin. Il a également reçu un traitement immunosuppresseur, le ruxolitinib, qui pourrait avoir aidé à réduire les réservoirs du virus. Après l’arrêt de son traitement antirétroviral, il y a deux ans, le VIH reste indétectable dans son sang et ses cellules immunitaires, bien que des traces non réplicatives aient été retrouvées dans son système digestif. Ce cas, similaire à d’autres rares rémissions observées après des greffes de cellules souches, apporte de précieuses informations pour mieux comprendre comment le VIH pourrait être éliminé du corps et ouvre des pistes pour la recherche vers un traitement curatif.

    Il est important de rappeler cependant qu’un traitement curatif fondé sur une greffe de cellules souches n’est pas transposable aux millions de personnes vivant avec le VIH dans le monde. C'est une procédure complexe, coûteuse et risquée (potentiellement mortelle). « Il est nécessaire de trouver un donneur compatible au niveau immunogénétique pour éviter le rejet de la greffe », expliquait ainsi le Dr Asier Sáez-Cirión, responsable de l’unité Réservoirs viraux et contrôle immunitaire à l’Institut Pasteur, à France Info, en février 2023. « De plus, étant donné que moins de 1 % de la population générale porte cette mutation protectrice du VIH, il est très rare qu’un donneur de moelle compatible ait cette mutation. Finalement, il s’agit d’une situation exceptionnelle quand tous ces facteurs coïncident pour que cette greffe soit un double succès de guérison, de la leucémie et du VIH », concluait le chercheur.

    Fin du VIH en 2030 : un objectif irréaliste

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    Chris Beyrer, professeur à l'École de santé publique Bloomberg de l'Université Johns Hopkins (États-Unis) et ancien président de l'International AIDS Society/IAS, lors de sa présentation sur la situation actuelle de l'épidémie de sida dans le monde, lors de la Croi 2025. Photo : Fred Lebreton

    En plénière, Chris Beyrer, professeur à l'École de santé publique Bloomberg de l'Université Johns Hopkins (États-Unis) ― et ancien président de l'International AIDS Society/IAS ― a fait une présentation brillante (quoiqu’un peu déprimante) de la situation actuelle de l’épidémie de VIH à l’échelle mondiale. L’expert a souligné que la fin de l’épidémie de VIH en 2030 était un objectif irréaliste : « Il n’existe aucun scénario concevable dans lequel nous ne traiterons pas des millions de personnes pendant encore des décennies. » L’épidémie continue de progresser dans plusieurs régions du monde, notamment en Amérique latine, au Moyen-Orient, en Europe de l’Est et en Asie centrale. Loin d’être éradiqué, le VIH reste un enjeu de santé publique majeur, avec une prévalence qui pourrait encore augmenter jusqu’en 2050. Chris Beyrer a insisté sur le fait que la lutte contre le VIH reposait sur trois principes fondamentaux : diversité, équité et inclusion. Des valeurs attaquées par Donald Trump et ses partisans-es. « Aucun président, aucun gouvernement, aucune loi ni aucun décret ne peut nous empêcher d’utiliser ces mots et d’intégrer ces principes dans notre activisme. » Citant Desmond Tutu, il a rappelé que chaque individu mérite d’être traité avec dignité : « Dieu vous aime tel que vous êtes. Ne laissez jamais personne vous faire sentir inférieur pour ce que vous êtes. »

    Face à une épidémie toujours active, la prévention doit être renforcée. La Prep a prouvé son efficacité, mais son accès reste limité, en particulier pour les populations les plus exposées, comme les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH), les travailleurs-ses du sexe, les personnes transgenres et les jeunes femmes vivant dans des régions à forte prévalence. Si la Prep orale a connu un essor en 2023 et 2024 grâce au programme Pepfar (le Plan présidentiel américain de lutte contre le sida) ― qui a financé 91 % des initiations mondiales ― elle n’est pas une solution universelle. « La Prep ne sera jamais l’équivalent d’un vaccin, car elle nécessite un accès ciblé », explique Chris Beyrer. Pour espérer contrôler l’épidémie, il faudrait que plus de 40 millions de personnes en bénéficient, un objectif aujourd’hui hors de portée.
     

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    La présentation de Chris Beyrer a notamment démontré la très forte efficacité du programme américain Pepfar que Donald Trump et son administration ont pourtant décidé de suspendre, dans l'incompréhension générale du monde de la lutte contre le sida. Photo : Fred Lebreton

    L’incidence du VIH reste alarmante dans certaines populations : aux États-Unis, elle demeure élevée chez les hommes noirs ayant des relations sexuelles avec des hommes, tandis que les essais de contraception en Afrique australe et de l’Est révèlent une forte transmission chez les femmes. Des solutions comme le lénacapavir, un antirétroviral injectable à longue durée d’action, pourraient être des outils efficaces, notamment pour ces populations. Mais l’urgence actuelle est la survie des programmes de prévention et de traitement. Pepfar, qui a sauvé 25 millions de vies, mis sous traitement 20,5 millions de personnes et évité la transmission du VIH à 5,5 millions de bébés, est aujourd’hui en péril. « Sans Pepfar, l’accès à la Prep est fortement limité », alerte Chris Beyrer. L’arrêt de son financement risque d’entraîner une explosion des nouvelles infections et une hausse des décès. « Les 90 jours de pause [décrétés par Donald Trump, ndlr] vont causer des centaines de milliers de morts et des dizaines de milliers d’infections infantiles », avertit le professeur. Les cliniques communautaires pour les populations clés sont privées de ressources, la distribution des traitements est menacée et les stratégies de prévention à l’arrêt. Si les financements ne sont pas rapidement rétablis, les progrès réalisés ces vingt dernières années pourraient être réduits à néant. Chris Beyrer appelle donc à la restauration immédiate de Pepfar, au soutien des cliniques communautaires et à la préservation des droits humains dans la riposte au VIH : « Nous n’avons pas à attendre l’approbation des politiciens pour faire ce qui est juste dans l’intérêt de toute l’humanité », a conclu l’expert.

    Prévention de la transmission du VHB de la mère à l'enfant : une alternative aux immunoglobulines

    Chez les nouveau-nés de mères vivant avec le virus de l’hépatite B (VHB) avec un antigène HBe positif ― signe d’une charge virale élevée ― il est recommandé d’administrer des immunoglobulines anti-VHB en complément du traitement par ténofovir, donné à la mère durant le dernier mois de grossesse et jusqu'à deux mois après l’accouchement. Les immunoglobulines sont produites par les globules blancs et constituent une partie importante du système immunitaire. L’accès à ces immunoglobulines reste difficile dans de nombreux pays à ressources limitées. Une étude a donc exploré l’efficacité de la vaccination contre le VHB dès la naissance comme alternative. Sur 504 femmes recrutées et 423 grossesses étudiées, seulement quatre cas de transmission du VHB ont été observés, dont deux correspondant à une infection in utero. Bien que cette stratégie de vaccination ne garantisse pas une protection totale, elle pourrait être une solution pragmatique pour réduire la transmission du virus dans les contextes où l’accès aux immunoglobulines reste encore limité.

    Dépistage du VIH à domicile chez les couples au Kenya : l'importance de l'accompagnement (counseling)

    Une étude menée au Kenya a évalué une approche de dépistage du VIH à domicile pour les couples attendant un enfant, en comparant trois méthodes : la visite avec accompagnement (counseling), la distribution d’autotests et le suivi standard en clinique. L’objectif était de mesurer l’impact du counseling sur l’acceptation du dépistage et l’accès aux soins en cas de résultat positif. L’étude a suivi 800 couples, avec cinq visites pendant la grossesse et après l’accouchement. Deux tiers des femmes étaient séropositives. Les résultats montrent que le dépistage du partenaire masculin était plus fréquent avec l’accompagnement du counseling ou la mise à disposition d’autotests qu’avec le suivi standard. De plus, la suppression virale (le fait d’être en charge virale indétectable) était meilleure dans le groupe ayant bénéficié de counseling, soulignant ainsi l’importance de l’accompagnement pour améliorer l’adhésion aux soins et réduire le risque de transmission du VIH.

    Le dolutégravir n'affecte pas l'efficacité des contraceptifs longue durée selon une étude au Bostwana

    Au Botswana, où les contraceptifs à action prolongée, tels que les implants et les injections, sont largement utilisés, une étude a évalué l’impact du dolutégravir (DTG) sur leurs niveaux dans le sang (plasmatiques) chez les femmes vivant avec le VIH. Des interactions avaient été observées auparavant avec certains traitements antirétroviraux, comme l’éfavirenz (EFV), qui réduisaient l’efficacité des contraceptifs et augmentaient le risque d’échec contraceptif. Dans cette étude, les taux plasmatiques des contraceptifs ont été comparés entre des femmes prenant du DTG et des femmes séronégatives. Les résultats montrent qu’il n’y avait aucune différence significative entre les groupes, ni avant ni après l’introduction du DTG. Ainsi, aucune interaction entre le dolutégravir et les contraceptifs longue durée n’a été observée, confirmant leur compatibilité et offrant une option rassurante pour les femmes vivant avec le VIH.

    Le lénacapavir : une option prometteuse pour les adolescentes et jeunes femmes

    Les adolescentes sont souvent exclues des essais cliniques, notamment en raison d’une observance plus difficile des traitements. L’étude PURPOSE 1 a évalué l’efficacité, la tolérance et la pharmacocinétique (l’action de l’organisme sur un médicament) du lénacapavir (LEN) en Prep à longue durée d’action chez les jeunes femmes âgées de 16 à 18 ans et de 18 à 25 ans. L’essai comprenait trois groupes : une injection sous-cutanée de LEN, un traitement oral à base de ténofovir alafénamide (TAF) ou  à base de ténofovir disoproxil (TDF). Aucun cas d’infection n’a été rapporté dans le groupe recevant le LEN, ce qui souligne son efficacité. De plus, 94 % des adolescentes et 88 % des jeunes adultes sous LEN n'ont signalé aucun effet indésirable, et les taux plasmatiques du médicament étaient similaires entre les deux groupes d’âge. Ces résultats renforcent l’intérêt du lénacapavir comme option de Prep adaptée aux jeunes femmes, une population particulièrement exposée au VIH.

    Interruption du traitement et mortalité des enfants vivant avec le VIH dans les pays soutenus par le programme Pepfar

    L’étude a analysé l’impact des interruptions de traitement sur la mortalité infantile liée au VIH entre 2020 et 2024, dans 53 pays bénéficiant du programme américain Pepfar. Ce programme a permis d’offrir un traitement antirétroviral à plus de 500 000 enfants infectés par le VIH. L’analyse a porté sur 523 000 enfants sous traitement, dont 21 325 ont connu une interruption de traitement de plus de 28 jours, avec une fréquence plus élevée dans les six derniers mois de suivi. Parmi ceux ayant interrompu leur traitement, certains ont repris les soins tandis que d’autres ne les ont jamais repris. Les conséquences des interruptions de traitement sont particulièrement marquées chez les enfants de moins de cinq ans, qui sont les plus vulnérables aux complications et aux décès liés au VIH. Parmi les enfants dont la cause du décès est connue, 54 % sont directement décédés d’une maladie liée au sida. Ces résultats soulignent l’importance du maintien dans les soins et des stratégies pour prévenir les interruptions de traitement, notamment chez les plus jeunes, qui paient le plus lourd tribut en cas de rupture dans leur prise en charge.

    Pharmacocinétique du dolutégravir chez les nouveau-nés : une avancée pour la prévention de la transmission de la mère à l'enfant

    L’étude PETITE-DG, menée en Afrique du Sud, a évalué l’adaptation du dolutégravir (DTG) sous forme dispersible et en films oraux pour les nouveau-nés. Jusqu’à présent, des formulations adaptées existaient pour d’autres antirétroviraux comme l’AZT/3TC et le LPV/r, mais pas pour les nourrissons de moins de 28 jours. Dans cette étude, 43 nouveau-nés à terme, pesant plus de deux kilos, ont reçu ces nouvelles formulations de dolutégravir. L’analyse pharmacocinétique a montré que les concentrations de dolutégravir restaient à des niveaux efficaces lorsqu’il était administré toutes les douze heures, sans effets indésirables liés au traitement. Ces résultats confirment l’intérêt du dolutégravir dans la prévention de la transmission du VIH de la mère à l’enfant et ouvrent la voie à une meilleure prise en charge des nouveau-nés exposés au virus dès les premiers jours de vie.

    Résistances aux antirétroviraux chez les enfants africains, en deuxième ligne de traitement

    Une étude menée en Afrique de l’Est a comparé l’efficacité des schémas de deuxième ligne chez les enfants après l’échec d’un premier traitement contre le VIH. Les résultats ont montré une supériorité du schéma associant le ténofovir alafénamide (TAF) et le dolutégravir (DTG) par rapport à l’abacavir/lamivudine (ABC/3TC) et à la zidovudine/lopinavir/ritonavir (ZDV/LPV/r). L’analyse des résistances avant l’initiation du traitement de deuxième ligne a révélé que les mutations de résistance à l’ABC étaient plus fréquentes que celles au TAF, ce qui expliquerait en partie la meilleure efficacité de ce dernier. De plus, très peu de résistances au dolutégravir ont été observées en cours de traitement, renforçant son rôle clé dans les stratégies thérapeutiques pédiatriques. Ces résultats confirment l’intérêt d’un passage précoce à un traitement optimisé pour améliorer les chances de succès virologique chez les enfants vivant avec le VIH.

    Abemaciclib : un nouvel espoir contre le sarcome de Kaposi

    Le sarcome de Kaposi (KS) est une maladie liée à un virus de la famille des herpès, touchant particulièrement les personnes immunodéprimées, notamment celles vivant avec le VIH en stade sida. Si les antirétroviraux constituent le traitement de première ligne, ils ne suffisent pas toujours, nécessitant parfois des chimiothérapies lourdes. Une étude récente a évalué l’efficacité de l’abemaciclib, un immunomodulateur qui stimule la réponse immunitaire contre le sarcome de Kaposi. Parmi les 31 patients-es traités-es, dont 17 avaient déjà reçu une chimiothérapie, une réduction des lésions a été observée chez 81 % d’entre eux-elles, atteignant même 90 % chez les patients-es n’ayant pas été préalablement traités-es. Cependant, des neutropénies (une diminution des globules blancs) ont été constatées chez 80 % des participants-es, un effet indésirable comparable à celui des chimiothérapies classiques. Bien que le mécanisme exact d’action de l’abemaciclib sur le sarcome de Kaposi reste encore à préciser, ces résultats ouvrent une piste prometteuse pour améliorer la prise en charge de cette maladie.

    Cancer du pharynx et VIH : une prise en charge inégale

    Les personnes vivant avec le VIH ont un risque deux fois plus élevé de développer un cancer du pharynx, majoritairement lié au papillomavirus humain (HPV), avec un taux de survie à cinq ans de seulement 46 %, contre 61 % chez les personnes séronégatives. Cette disparité interroge : est-elle due à l’immunosuppression ou à un accès limité aux traitements ? Une étude rétrospective a comparé des patients-es atteints-es de ce cancer en fonction de leur statut VIH, en tenant compte de l’âge, de l’année du diagnostic et du stade de la tumeur. Les résultats montrent une différence notable dans la prise en charge : les personnes vivant avec le VIH reçoivent moins souvent une chimiothérapie et sont plus fréquemment traitées par radiothérapie seule. Pourtant, le délai avant la mise en place du traitement n’explique pas cette disparité. Ces résultats suggèrent un possible biais dans l’accès aux soins ou dans les décisions thérapeutiques, mettant en lumière un besoin urgent d’équité dans la prise en charge des cancers chez les personnes vivant avec le VIH.

    Comparaison des estimations de l'incidence du VIH en Afrique sub-saharienne

    Cette étude a comparé les taux réels de nouvelles infections au VIH, issus de plusieurs
    enquêtes de terrain, avec les estimations modélisées par l’Onusida. L’analyse a pris en compte l’année, le district, le genre et les groupes d’âge. Globalement, les modèles de l’Onusida reflètent bien la réalité lorsqu’ils concernent la population générale. Cependant, les données issues d’échantillons non représentatifs montrent des taux d’infection jusqu’à trois fois supérieurs aux estimations modélisées. L’étude souligne une forte incidence du VIH chez les personnes de 25 ans et plus, ainsi que des taux particulièrement élevés chez les femmes enceintes et les populations clés (comme les travailleuses du sexe et les hommes ayant des relations avec d’autres hommes). Pour ces groupes, les modèles sous-estimeraient l’ampleur réelle des nouvelles infections, ce qui pourrait avoir un impact sur les stratégies de prévention et de prise en charge.

    Impact du dolutégravir et de la pandémie de Covid-19 sur la charge virale VIH en Afrique du Sud

    Cette étude de cohorte rétrospective (analyse des données passées pour évaluer le lien entre une exposition et un effet) a suivi 386 053 personnes vivant avec le VIH adultes sous traitement antirétroviral (ARV) entre 2005 et 2023. Parmi elles, 7,5 % ont initié un traitement avec le dolutégravir et 14,3 % y ont été basculées après avoir atteint une charge virale indétectable. La proportion de personnes ayant une charge virale indétectable est passée de 92 % en 2005 à 86 % en 2011, probablement en raison de ruptures de stock de médicaments cette année-là. Depuis 2011, ce taux a progressé de manière continue, atteignant 95 % en 2023, y compris pendant la pandémie de Covid-19. Les personnes vivant avec le VIH sous dolutégravir présentent le plus faible risque d’échec virologique, et une durée plus longue dans le parcours de soins réduit encore ce risque. L’amélioration des indicateurs du VIH repose ainsi sur l’accès aux nouvelles molécules, la résilience des systèmes de santé en période de crise et une bonne rétention des personnes dans les soins.

    Mpox en Ouganda : circulation virale et co-infections

    Le Mpox est endémique en Ouganda, avec des cas signalés depuis 1970. Face à l’augmentation des infections, une surveillance renforcée a été mise en place à la frontière avec la République démocratique du Congo (RDC) en mai 2024. Cependant, la majorité des cas recensés en Ouganda sont liés au Clade Ib en provenance de la RDC. Au 9 mars 2025, environ 3 800 cas ont été confirmés, touchant principalement des hommes, avec une forte prévalence chez les 18-29 ans. Des analyses moléculaires et des séquençages ont aussi révélé que parmi les personnes présentant des symptômes similaires au Mpox, mais testés négatifs, 83 % étaient en réalité infectées par le virus de la varicelle-zona. Cette situation souligne l'importance d’effectuer des tests PCR élargis pour identifier d'autres infections en circulation et mieux comprendre la dynamique des co-infections entre le Mpox et d'autres virus.

    Les scientifiques et activistes unis-es contre les coupes budgétaires de Trump
     

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    « La recherche, c’est la résistance. La science, c’est la survie. Nous ne partirons pas ! » En cette fin de journée, juste à la sortie du centre de conférence de la Croi environ 300 scientifiques se sont retrouvés-es au rassemblement « Save Our Sciences : Rally for HIV Research » (« Sauvons notre science : rassemblement pour la recherche sur le VIH ») pour dénoncer les coupes budgétaires menaçant la recherche sur le VIH. Présent au rassemblement, Bruno Spire, directeur de recherche à l’Inserm et administrateur de AIDES, souligne le caractère inédit de cette mobilisation : « C'est la première fois que je vois cela à la Croi. Habituellement, cette conférence reste cloisonnée dans la science pure, loin de l’activisme. Aujourd’hui, les scientifiques eux-mêmes se mobilisent, car ils ont compris que tout est politique. »
     

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    David Michels ( directeur Innovations Programmes à AIDES), Fabrice Pouradier (médecin urgentiste), Luis Sagaon-Teyssier (chercheur) et Bruno Spire (chercheur et administrateur de AIDES) lors de la manifestation « Save Our Sciences : Rally for HIV Research » (« Sauvons notre science : rassemblement pour la recherche sur le VIH ») organisée en marge de la Croi 2025.
    Photo : Fred Lebreton

    L’ancien président de AIDES rappelle que lors du premier mandat de Donald Trump, des alertes avaient déjà été lancées, mais cette manifestation au sein de la conférence marque un tournant. Inquiet des conséquences de ces restrictions, Bruno Spire avertit : « Tout ce qui a été gagné ces dix dernières années risque d’être anéanti en quelques mois. L’incidence du VIH pourrait tripler d’ici 2030 si rien n’est fait. » Et le chercheur de dénoncer l’idéologie réactionnaire qui sous-tend ces coupes : « Ils ont commencé par s’attaquer aux personnes trans. Demain, ce sera au tour des gays, puis des femmes. Et ensuite, de toutes les minorités. C’est un engrenage dangereux. » Malgré une mobilisation encore timide, la participation de nombreux scientifiques peut être perçue comme un signal d’un éveil politique au sein du monde de la recherche face aux violentes attaques de l’administration Trump.