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    L’Actu vue par Remaides : « Keiko Lane, souvenirs d'une adolescente queer et activiste sida »

    • Actualité
    • 03.10.2024

     

    couverture livre KEIKO

     

    Par Fred Lebreton

    Keiko Lane, souvenirs d'une adolescente queer et activiste de la lutte contre le sida

    Keiko Lane, 50 ans, thérapeute et autrice basée à Los Angeles, n'était qu'une adolescente lycéenne lorsqu'elle s'est impliquée dans les groupes d'activistes LGBT+ et de lutte contre le sida à Act Up LA (Los Angeles) et Queer Nation, à la fin des années 1980 et au début des années 1990. Elle vient de publier (en anglais) ses mémoires. Remaides fait les présentations.

    Keiko Lane, 50 ans, thérapeute et autrice basée à Los Angeles, n'était qu'une adolescente lycéenne lorsqu'elle s'est impliquée dans les groupes d'activistes LGBT+ et de lutte contre le sida à Act Up LA (Los Angeles) et Queer Nation, à la fin des années 1980 et au début des années 1990. Là-bas, elle a rencontré des personnes queer plus âgées qui sont devenues ses mentors, ses protecteurs-rices et sa « famille choisie ». Parmi ces activistes, des hommes gays séropositifs en stade sida avec qui elle devenue amie et qu’elle a accompagnés jusqu’à leur décès dans les années qui ont suivi. Keiko Lane a quitté Los Angeles pour l'université, mais elle porte depuis des décennies les souvenirs de ces années de protestations, d’engagement artistique, de fêtes et de découverte de soi. Dans un long entretien accordé au site Poz, la militante revient sur cette période, à l’occasion de la sortie de ses mémoires intitulés « Blood Loss : A Love Story of AIDS, Activism and Art », ouvrage publié le 17 septembre aux Éditions de Duke University Press.

    « J'avais commencé à travailler sur la construction de coalitions avec Act Up. À Los Angeles, à la fin des années 1980, si vous vouliez mobiliser rapidement la gauche pour une manifestation, vous appeliez Act Up, vous contactiez la Student Coalition, un groupe d'activistes jeunes qui s'était initialement formé autour de l'apartheid, et vous appeliez le CISPES, qui était le Comité de solidarité avec le peuple du Salvador. J'avais commencé à participer aux manifestations d'Act Up en 1989, ainsi qu'aux réunions d'Act Up et de Queer Nation au début de l’année 1991, quand j'avais 16 ans », se souvient Keiko Lane.

    La militante raconte comment, malgré son jeune âge, le milieu de l’activisme LGBT et VIH est devenu sa seconde famille : « Dès l'âge de 12 ou 13 ans, j'étais déjà impliquée dans l'activisme en travaillant au sein de la communauté avec des réfugiés et des demandeurs d'asile et en participant à des manifestations contre les violences policières à Los Angeles ou au consulat d'Afrique-du-Sud à Los Angeles contre l'apartheid. C'était donc déjà normal pour moi. Ainsi, lorsque j'étais à Act Up et Queer Nation, j'étais souvent bouleversée et traumatisée, mais je ne pouvais pas imaginer m'éloigner du sentiment de communauté que ces groupes m'apportaient en tant que jeune personne. Et parce que j'étais l'une des plus jeunes du groupe, voire la plus jeune, j'étais incroyablement aimée et protégée. Les gens étaient très protecteurs envers moi ».

    Comment faire face à la mort de membres de sa famille de cœur à un si jeune âge ? Keiko Lane n’enjolive pas la réalité de cette période sombre de l’épidémie de sida : « La réponse simple est que j'étais absolument traumatisée. Je pense que nous l'étions tous. Mais il y a souvent une illusion selon laquelle, si quelque chose a été traumatisant, si nous pouvions revenir en arrière, nous ne le referions pas. Mais si je devais revenir en arrière, je ne m'en éloignerais pas juste pour éviter le deuil ».

    Sur une note plus légère, Keiko Lane raconte aussi son immersion dans le milieu de la nuit LGBT et notamment ses sorties au célèbre Club Fuck ! : « Ce n'était pas un élément central de ma vie, mais il y avait des gens d'Act Up et de Queer Nation qui fréquentaient ce lieu, alors on finissait par s'y retrouver (...). Je ne buvais pas et ne prenais pas de drogues. J'étais toujours l'une des conductrices désignées. Je grandissais à Echo Park et j'allais au lycée public de Silver Lake. Mais au Club Fuck ! il y avait un DJ et des scènes pour les go-go dancers. La sexualité et l'érotisme étaient omniprésents, mais de mes souvenirs, ce n'était pas comme si je me retrouvais au milieu d'un sex-club. Il y avait une énergie et une mise en scène de la performance sexuelle, un espace sûr et scandaleux pour les hors-la-loi queers ».