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    L’Actu vue par Remaides : « PLFSS 2025 : des tribunes appellent à ouvrir des débats sur la santé et la couverture sociale »

    • Actualité
    • 09.11.2024

     

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    © DR

    Par Jean-François Laforgerie

     

    PLFSS 2025 : des tribunes appellent à ouvrir des débats sur la santé, l'accès aux soins et la couverture sociale

    Démarrage complexe pour les débats à l’Assemblée nationale sur le projetd e loi de financement de la Sécurité sociale. Le PLFSS 2025 a été rejeté à l’unanimité des députés-es en commission des Affaires sociales et plusieurs articles ont été supprimés en séances publiques. Dans ce contexte, des tribunes ont été publiées. Elles appellent à ouvrir des débats sur la santé et la couverture sociale. De son côté, France Assos Santé défend les taxes comportementales dans le PLFSS 2025 pour une alimentation plus saine et plus durable. Enfin, le Sénat a publié un rapport, attendu, sur les « femmes sans abri ».  La rédaction de Remaides fait le point sur l’actualité dans le champ de la santé et du social.

    Les députés-es rejettent en commission le projet de budget de la Sécu

    Quand cela ne veut pas ! Les députés-es de la commission des Affaires sociales ont rejeté vendredi 25 octobre à l’unanimité la partie recettes du projet de budget de la Sécurité sociale pour 2025 (PLFSS 2025), faisant ainsi tomber l’ensemble du texte. Plusieurs mesures-clés avaient déjà été supprimées. La commission avait ainsi retoqué la refonte des cotisations patronales et le gel des pensions de retraite, voulues par le gouvernement pour dégager chacune quatre milliards d’euros d’économies. La gauche avait fait passer diverses taxes sur la « fortune des milliardaires », les « superprofits », les dividendes et les « retraites chapeaux » pour renflouer les caisses avec des milliards d’euros de ressources supplémentaires. Des modifications profondes qui ont conduit la commission à rejeter le 24 octobre la partie recettes du texte, avant donc de voter contre le volet « dépenses ».
    Au passage, les députés-es ont repoussé l’objectif de dépenses de l’assurance maladie, pilier du texte, avec l’avis favorable du rapporteur Yannick Neuder (LR) afin « d’envoyer un message » au gouvernement. Il s’agit d’une situation inédite qui démontre qu’« il n’y a pas de pilote dans l’avion », a réagi le député socialiste Jérôme Guedj, inquiet de n’avoir « pas eu le début de commencement d’un point d’atterrissage par l’exécutif ». « Il y a vraiment une fronde » qui « dépasse le Nouveau Front populaire », a souligné la députée écologiste Sandrine Rousseau, disant « espérer que le gouvernement va l’entendre ». « Lorsque le budget de Michel Barnier est arrivé en commission, il n’avait aucun soutien. Maintenant qu’il repart, il n’a que des adversaires », a taclé le député Insoumis Hadrien Clouet. « Pour des raisons différentes, les groupes se sont rejoints sur le non-vote », a nuancé la députée macroniste Stéphanie Rist, jugeant qu’il « faut revoir la copie » et y « apporter des modifications si on veut que ce texte soit voté ». Le débat dans l’hémicycle devait repartir le 28 octobre de la version initiale du projet de loi.

    PLFSS 2025 : des tribunes ouvrent des débats sur la santé et la couverture sociale

    Après l’examen inabouti du budget de l’État, les députés-es ont entamé lundi 28 octobre dans l’hémicycle celui du budget de la Sécurité sociale pour l’année prochaine (PLFSS 2025). Lors des premières séances publiques, les premiers articles du texte ont été rejetés, mettant sous pression un gouvernement qui est peu pressé d’utiliser l’arme du 49.3. C’est un nouveau revers pour l’exécutif sur un des textes majeurs du budget. Les débats pourraient se crisper davantage encore sur deux sujets : les exonérations de cotisations patronales et le gel des pensions de retraite. Mais d’autres sujets en lien avec la santé ont émergé. On peut en juger par la publication (toute récente) de plusieurs tribunes dans les journaux. On peut citer celle de Philippe Bergerot, président de la Ligue contre le cancer, qui interpelle les pouvoirs publics sur les enjeux de la prévention dans un texte publié par Le Monde (28 octobre) : « Pourquoi ne pas demander une contribution aux industriels participant à la hausse des cancers plutôt que des économies sur les patients qui en souffrent ? » Dans son texte, Philippe Bergerot enjoint le gouvernement à « investir » dans une politique de prévention, qui permettrait en retour une baisse des dépenses de la Sécurité sociale. « Les discussions qui s’engagent (…) au Parlement (…) seront cruciales pour l’avenir de notre système de santé. Le cancer demeure encore aujourd’hui la première cause de décès prématurés en France. Pour autant, la copie actuelle proposée par le gouvernement manque clairement de courage. En ne ciblant pas les responsables des facteurs de risque de maladie, il fait porter uniquement la charge sur les personnes malades, en introduisant une hausse des franchises, et complexifie le critère de pertinence des prescriptions – ce qui engendrera in fine des refus de remboursement de la part de l’Assurance-maladie ». Le président de la Ligue contre le cancer y voit d’ailleurs une « double peine pour les Français atteints de cancer, dont certains risquent de renoncer progressivement à leurs soins ». Dans son texte, il propose différentes mesures dont l’instauration « d’un prix minimal sur l’alcool », l’augmentation du prix du paquet de cigarettes et appelle « à la tenue des États généraux de la santé afin de réfléchir au financement de notre système solidaire avec pour objectif principal le « bien vieillir ». Et de conclure : « Il est inacceptable que les personnes malades soient aujourd’hui considérées comme la variable d’ajustement des politiques publiques, alors que, pour faire face aux dépenses, il existe des alternatives crédibles, qui sont à la fois plus justes, plus efficaces et parfois attendues depuis des décennies. Ce n’est plus le moment de le dire mais de le faire. »

    Autre initiative lancée dans les colonnes du Monde (25 octobre), celle d’un collectif de cinq médecins (François Bourdillon, Mady Denantes, Anne Gervais, André Grimaldi et Olivier Milleron) qui dénonce les « doublons » des frais de gestion entre Assurance-maladie et assurances privées, suggérant d’économiser de ce côté plutôt que d’augmenter le reste à charge des assurés-es. « Pour réduire le déficit des dépenses publiques, le gouvernement propose de donner un coup de frein aux dépenses de santé, qui représentaient, en 2022, 11,9 % du produit intérieur brut (PIB) de la France, nous plaçant en deuxième position des pays européens derrière l’Allemagne (12,6 %). Toutefois, en euros par habitant, l’Allemagne dépense en moyenne 20 % de plus que la France (4 343 euros versus 3 475 euros) », expliquent les auteurs-rices. « La France est, en revanche, en tête des pays européens en matière de frais de gestion des financeurs des soins de santé : 6 % des dépenses de santé, contre 5 % en Allemagne et 3 % pour la moyenne des pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) », souligne la pétition. Les auteurs-rices rappellent que « nous avons pour chaque soin une double gestion, par l’Assurance-maladie obligatoire, d’une part, et par les assurances privées complémentaires, d’autre part » ; d’où la proposition d’une « intégration des mutuelles dans une « Grande Sécu » remboursant à 100 % un panier de prévention et de soins solidaire [qui] permettrait à la collectivité d’économiser 5,4 milliards d’euros par an ». La tribune rappelle que cette « mesure de bon sens est faisable puisqu’elle existe déjà en Alsace-Moselle, où deux millions de salariés bénéficient, pour des raisons historiques, d’un régime de santé spécial ». Sa généralisation (ou pas) est donc une volonté politique.

    La proposition d'une "Grande Sécu"

    Un autre sujet est l’objet d’une tribune : la hausse de dix points du ticket modérateur envisagée par le gouvernement dans le cadre du PLFSS 2025. C’est une mesure « injuste, inefficace et coûteuse », dénoncent Simon Arambourou, Vincent Beaugrand, Ludovic Cépré, Julie Chastang, Prune Hefter-Noah, Marie Pla, membres du collectif Nos services publics, dans un texte publié dans Libération (28 octobre). Parmi les pistes « d’économies » envisagées pour diminuer drastiquement les dépenses publiques, figure cette « hausse de 10 points du ticket modérateur sur les consultations de médecins généralistes ». Actuellement, la branche maladie de la Sécurité sociale rembourse 70 % du tarif opposable de la consultation de médecine générale, les 30 % restants étant pris en charge par l’assuré-e ou par la complémentaire Santé pour les personnes qui en ont une. « Avec la hausse du ticket modérateur prévue par le gouvernement, l’Assurance maladie ne rembourserait plus que 60 % du tarif opposable. Un tel recul de la prise en charge des soins de santé par la Sécurité sociale présente le triple inconvénient d’être inégalitaire, de favoriser le renoncement aux soins pour raisons financières et d’être globalement plus coûteux pour l’ensemble des Françaises et des Français », avancent les auteurs-rices de cette tribune. Ils-elles estiment que « chaque diminution de la prise en charge [des] soins par l’Assurance maladie au profit des complémentaires correspond de fait à une mauvaise allocation [des] ressources (…) Une telle transformation des dépenses sociales publiques en dépenses privées contraintes se traduira inévitablement par une hausse globale des dépenses de santé, comme c’est le cas aux États-Unis, dont le système de santé est caractérisé par une faible prise en charge socialisée des dépenses de santé et par un niveau très élevé des dépenses de santé : ces dernières y représentent 18 % du PIB, contre 12 % en France. Un tel niveau de dépenses de santé représenterait pour la France une augmentation de 170 milliards d’euros par an, soit un surcroît de dépenses de 2 500 euros par Français et par an ». Les auteurs-rices proposent un autre « choix nettement plus vertueux (…) celui du ʺ100 % Sécuʺ ou de la ʺGrande Sécuʺ, c’est-à-dire la suppression des tickets modérateurs et autres franchises conduisant à une prise en charge à 100 % des dépenses de santé (hors dépassements d’honoraires). Le 100 % Sécu se traduirait non seulement par des gains importants de pouvoir d’achat pour les Français, qui n’auraient plus à souscrire à une complémentaire santé (…) mais aussi par une réduction nette de 5,4 milliards d’euros par an des dépenses de santé du fait de la suppression des coûteux frais de gestion des complémentaires. Ces économies pourraient alors être affectées au financement de l’hôpital ou à la prise en charge des affections de longue durée (ALD) dont on sait que les besoins vont croître du fait de l’allongement de l’espérance de vie. »

    Sénat : un rapport sur les "femmes sans abri"

    Le nombre de personnes sans domicile a doublé en dix ans en France, pour atteindre 330 000 en 2024, dont environ 120 000 femmes, indique un rapport du Sénat, publié le 8 octobre dernier. Si la majorité est hébergée dans des lieux financés par l'État, certains hébergements d'urgence ne sont octroyés que pour quelques nuits. Chaque soir, environ 3 000 femmes et près de 3 000 enfants sans abri passent la nuit dans la rue, avance le rapport. Il ne s’agit que d’estimations. En effet, les opérations de décompte des femmes sans abri sont rendues complexes par les stratégies d'invisibilisation que celles-ci adoptent afin ne pas s'exposer aux violences de la rue (mobilité extrême, dissimulation dans des espaces clos, apparence soignée…), avancent les autrices du document. « L'absence de domicile et les conditions de vie précaires qui y sont associées exposent les femmes à de multiples facteurs de risque : vieillissement accéléré, troubles liés à une mauvaise alimentation et aux difficultés d'accès à l'hygiène, complications en cas de pathologies, risques d'infection au VIH et aux hépatites, épuisement psychique, troubles dépressifs, grossesses et naissances à risques, retards de prise en charge, renoncements aux soins, etc. », énumère le rapport.
    En outre, la quasi-totalité de ces femmes ont subi des violences physiques et sexuelles dans la rue. Elles sont particulièrement exposées aux risques d'exploitation par le travail et d'exploitation sexuelle (hébergements contre "services" et prostitution).
    Les rapporteures formulent vingt-deux recommandations autour de quatre axes :
    - sortir les femmes de l'ombre de la rue ;
    - assurer une offre d'hébergement à la hauteur des besoins des femmes et des familles ;
    - faciliter l'accès au logement ;
    - accompagner les femmes dans l'accès à leurs droits et faciliter leur quotidien.

    France Assos Santé défend les taxes comportementales pour une alimentation plus saine et plus durable

    « La France connaît une forte hausse des maladies chroniques en lien avec une mauvaise alimentation avec douze millions de Français concernés », constate France Assos Santé (FAS) dans un récent communiqué. À cela s’ajouterait une « épidémie d’obésité » qui se répandrait en Europe, touchant une personne adulte sur deux, alors que le surpoids et l’obésité affecteraient 20% des enfants. Dans ce contexte, FAS salue les initiatives de députés-es lors de l’examen du projet de loi pour le financement de la Sécurité sociale pour 2025 (PLFSS), présentées en commission des Affaires sociales. Les députés-es ont proposé plusieurs amendements en faveur d’une alimentation plus saine tels une réforme de la taxe soda qui n’est pas jugée assez efficace, l’obligation d’apposer le Nutri-Score sur tous les produits publicitaires pour les denrées alimentaires ou encore la création d’une taxe sur les sucres ajoutés dans les produits alimentaires transformés, dont les industriels devraient s’acquitter si leurs produits dépassent un certain taux de sucre.
    Dans un entretien à La Tribune Dimanche, la ministre de la Santé Geneviève Darrieussecq s’est dite favorable à l’instauration d’une taxe sur les sucres transformés des produits industriels, indique le communiqué de FAS.
    Le collectif y met en avant l’intérêt des taxes dites « comportementales ». FAS se dit convaincu qu’il faut « cesser de faire reposer la prévention sur la seule responsabilité des consommateurs » et milite depuis longtemps pour des mesures réglementaires ambitieuses en matière de « fiscalité comportementale à même de modifier durablement les habitudes alimentaires et de réduire l’impact néfaste des produits ultra transformés sur la santé des Français ».
    Le collectif a bien sûr noté « la levée de bouclier du ministère de l’Agriculture, et des lobbies agro-industriels ». C’est le cas de l’ANIA (association nationale des industries alimentaires) qui a dénoncé dans un communiqué des « mesures qui n’ont aucune vocation de santé publique et n’auront d’autre effet que de cibler la première industrie de France ». Un argument que conteste FAS : « Nous rappelons fermement que l’efficacité de la fiscalité comportementale sur les principaux facteurs de risque et de mortalité évitable que sont le tabac, l’alcool et l’alimentation, est démontrée de longue date et que ces mesures sont recommandées par l’Organisation mondiale de la Santé. »
    « Le PLFSS ayant été rejeté vendredi [25 octobre] par la commission des Affaires sociales, c’est le texte dans sa version initiale qui [devrait être] débattu en séance publique (…) nous comptons sur les députés-es pour redéposer ces amendements et transformer l’essai pour garantir aux Français des choix libres et éclairés en matière de consommation ainsi qu’un accès à une alimentation plus saine et plus durable ! », conclut FAS.