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    L'actu vue par REMAIDES : « Taxe lapin »… le gouvernement y va !

    • Actualité
    • 06.05.2024

    remaides actualités

     
     © Studio Capuche

    Par Jean-François Laforgerie  

    L'Onusida "Taxe Lapin"... le gouvernement 

    Période toujours chargée pour l’actualité sociale avec la tenue des Journées européennes des droits en santé (édition 2024), l’adoption définitive d’un projet de loi pour « sécuriser » Internet, le vote des eurodéputés-es en faveur d’une inscription de l’IVG dans la Charte des droits fondamentaux de l’UE, une pression de la société civile sur l’enjeu des contrôles au faciès pratiqués en France, de nouvelles recommandations qui épingle la « politique de sanctions » qui impacte les personnes précaires (minima sociaux, chômage) et aussi la présentation en conseil des ministres du projet de loi sur la fin de vie… Sans oublier, la volonté du gouvernement de mettre en place une « Taxe lapin »… Passage en revue.

    "Taxe Lapin"... le gouvernement y va

    Le gouvernement veut que certains rendez-vous médicaux non-honorés soient à l’avenir sanctionnés d’une pénalité financière de cinq euros à la charge du-de la patient-e fautif-ve, a déclaré le Premier ministre Gabriel Attal (6 avril) dans un entretien avec plusieurs titres de la presse régionale. Le chef du gouvernement avait déjà annoncé, lors de sa déclaration de politique générale, sa volonté de mettre en place cette nouvelle sanction dite « taxe lapin ». Celle-ci s’inscrit dans une batterie de mesures annoncées le 6 avril pour tenter de répondre à la crise du système de soins de ville avec la volonté de récupérer 15 à 20 millions de créneaux médicaux ; soit une façon de compenser les effets des déserts médicaux. Selon Matignon, il s’agit, en effet, de « répondre au souci majeur des Français : l’accès aux médecins, la capacité de trouver un rendez-vous dans des délais acceptables ». À propos des rendez-vous médicaux non-honorés, « on ne peut plus se le permettre », a déclaré le Premier ministre qui souhaite la mise en œuvre d’un « mécanisme de responsabilisation » via un texte de loi.

    Selon l’Ordre des médecins et certains syndicats professionnels comme l’UFML (Union française pour une médecine libre), le coût de ces « lapins » (rendez-vous manqués ou non-honorés) est estimé à 27 millions de consultations perdues chaque année.  Le gouvernement souhaite qu’à partir du 1er janvier 2025, sur les plateformes de rendez-vous en ligne type Doctolib, une pénalité financière de cinq euros sanctionne le-la patient-e qui ne s’est pas présenté-e au rendez-vous et qui n’a pas prévenu moins de 24 heures avant. Cette pénalité financière sera à la main mais aussi au bénéfice du-de la médecin qui aura la mission de le signaler. Interrogé le 7 avril sur Franceinfo, Gérard Raymond, le président de France Assos Santé (FAS), qui représente les usagers-ères du système de santé et fédère une centaine d’associations de santé a dénoncé une mesure de « culpabilisation ». Selon FAS, les rendez-vous non-honorés s'expliquent en partie par la longueur du délai avant d'obtenir un rendez-vous avec un-e médecin. Gérard Raymond s’est dit « plus que jamais opposé » à cette taxe, car d'après lui, le-la médecin « regardera à la fin du mois et se dira : « Il me manque quelques sous, donc je vais faire des déclarations de lapins » ». « Ça ne paraît pas très sérieux », commente-t-il. « On aimerait bien qu'il y ait plus de transparence, de clairvoyance et d'échanges », avant d'annoncer des mesures, a commenté le président de France Assos Santé.

    Contrôles au faciès en France : des ONG et associations saisissent l'ONU

    Haussement de ton ! Dénonçant « l’inaction » de la France dans la lutte contre les contrôles au faciès, cinq associations et ONG françaises et internationales ont saisi (jeudi 11 avril) l’ONU pour faire reconnaître « la nature systémique » de ces discriminations, explique l’AFP. Alors que le Conseil d’État, plus haute juridiction administrative française, a reconnu, cet automne, l’existence des contrôles au faciès par les forces de l’ordre, « l’État n’a pris aucune mesure pour faire face au problème », dénoncent Amnesty International France, Human Rights Watch (HRW), la Maison communautaire pour un développement solidaire (MCDS), Pazapas et le Réseau Égalité, Antidiscrimination, Justice Interdisciplinaire (Reaji) dans un communiqué commun publié le 11 avril. Ces associations ont déposé une requête auprès du Comité des Nations Unies pour l’élimination de la discrimination raciale (CERD).

    Elles demandent que ces experts-es reconnaissent « la nature systémique du problème du profilage ethnique en France et explicitent les mesures spécifiques que le gouvernement français devrait prendre pour faire cesser les contrôles au faciès ». Saisi par plusieurs organisations, parmi lesquelles Amnesty International France et HRW, le Conseil d’État avait reconnu, en octobre 2023, que ce type de contrôles « existaient » et ne se limitaient « pas à des cas isolés », sans pour autant qualifier cette pratique de « systémique ». Les ONG attendaient du Conseil d’État qu’il contraigne les autorités à prendre une salve de mesures — allant de la délivrance d’un récépissé après chaque contrôle à la modification du Code de procédure pénale — la juridiction avait botté en touche, s’estimant incompétente pour contraindre l’État à réformer en profondeur sa « politique publique » en la matière. « En ne prenant pas les mesures nécessaires pour mettre fin à cette pratique, l’État manque à ses obligations, y compris en vertu de plusieurs traités internationaux, dont la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale » que la France a signée en 1971, estiment les ONG. L’existence des contrôles au faciès est largement documentée depuis des années. En 2017, le Défenseur des droits (DDD) avait conclu qu’un jeune homme « perçu comme noir ou arabe » avait vingt fois plus de probabilités d’être contrôlé que le reste de la population. L’État français a été plusieurs fois condamné ces dernières années sur ce sujet, après une première condamnation définitive pour faute lourde prononcée en 2016 par la Cour de cassation.

    Minima sociaux, chômage : la politique de sanctions épinglée

    Contre-productif. Le Conseil national des politiques de lutte contre l’exclusion (CNLE) appelle à une révision de la politique de sanctions concernant les minima sociaux et les allocations de chômage. L’organisme prône la définition d’un minimum de ressources insaisissables. Dans un avis consulté mercredi 10 avril par l’AFP, cet organisme rattaché à Matignon se penche sur les sanctions au sens large (retenues sur les versements, les récupérations d’indus/trop perçus, les suspensions ou encore les radiations de droits...). « La sanction doit être mesurée à l’aune de la gravité du manquement, or le CNLE constate une dérive qui vise les populations qui perçoivent diverses allocations », peut-on lire dans l’avis. « La sanction qui consiste à pouvoir suspendre la totalité des versements des prestations sociales semble de plus en plus généralisée sur l’ensemble du territoire », constate l’organisme, quelques mois après l’adoption de la loi « pour le plein emploi » qui prévoit des sanctions pour le-la demandeur-se d’emploi en cas de manquement à ses obligations. De plus, Il n’y a « aucune communication préalable de la situation adressée au bénéficiaire. La personne perd même le minimum vital pour se nourrir », relève l’organisme. Loin d’être anodins, les effets collatéraux de ces sanctions « pénalisent doublement les allocataires » et peuvent « poser des obstacles à leur réinsertion », note l’avis. À l’inverse, de « simples rappels aux allocataires » s’avèrent « avoir des effets positifs », en plus d’être « moins brutaux » que la sanction. Devant ce constat, le CNLE émet huit recommandations à destination du gouvernement, dont celle visant à une meilleure information sur les sanctions et les contrôles. Il appelle également les pouvoirs publics à réfléchir à la définition précise d’un montant qui pourrait être déclaré insaisissable ; autrement dit : ne pas tout saisir. « Les allocataires des minima sociaux sont les débiteurs les moins bien protégés contre une législation de saisie alors qu’ils sont les plus vulnérables, il est urgent de remédier à cette situation », estime le CNLE. Quant aux « pratiques anormales, voire maltraitantes » (récupération d’indus sans avertissement préalable, refus ou absence de proposition d’échéanciers...), elles doivent être « corrigées » selon le CNLE qui préconise parallèlement un suivi « efficace du non-recours et de ses causes ». Ces recommandations ont été saluées par plusieurs associations, dont le Secours Catholique qui évoque « l’inquiétude générée chez les personnes vivant des situations de pauvreté par la politique actuelle de sanctions ». Il est important « de sécuriser les très modestes revenus de ces personnes et de préserver leurs droits à des « moyens convenables d’existence » pour reprendre l’expression du préambule de la Constitution », insiste-t-elle dans un communiqué.

    Biblio : Alcool : Connaitre ses limites

    Le Respadd (Réseau de prévention des addictions) vient de publier une nouvelle brochure « à destination des usagers » sur la consommation d’alcool. Cette brochure a été créée par le Centre canadien sur les dépendances et l'usage de substances (CCDUS). Le Respadd en a obtenu les droits et a adapté ce document à la situation française. La brochure a pour objectif de faire réfléchir chacun-e à sa consommation (au moyen d’un questionnaire à remplir), aux risques pris pour la santé (même en absence de toute dépendance). Elle permet aussi de voir quels outils peuvent être déployés pour limiter sa consommation, donne des repères et propose des pistes pour « changer ».

    La brochure de 36 pages est disponible gratuitement sur le site du Respadd consacré à l’alcool.

    Fin de vie : le projet de loi présenté en Conseil des ministres

    C’est parti ! Le projet de loi sur la fin de vie a été présenté mercredi 10 avril en Conseil des ministres. Le texte ouvre à de strictes conditions la possibilité d’un « suicide assisté ». Il est jugé trop tiède par certains-es, mais dangereux par d’autres. Ce texte, « relatif à l’accompagnement des malades et de la fin de vie », constitue la grande réforme sociétale du second quinquennat d’Emmanuel Macron, qui s’était engagé de longue date à changer la législation en la matière, rappelle l’AFP. Mais l’exécutif prend aussi le risque de réveiller de forts clivages éthiques et religieux sur le bien-fondé de la légalisation de l’euthanasie et du suicide assisté. Emmanuel Macron, qui a présenté les grandes lignes de ce projet en mars dernier, se refuse à employer ces deux termes, préférant celui d’« aide à mourir ». Toutefois, il s’agit bien de proposer à certains-es patients-es le moyen de mettre fin à leurs jours et, quand ils-elles sont incapables d’accomplir ce geste, de le faire pour eux-elles. Le texte envisage des conditions très strictes, comme en témoigne une version consultée par l’AFP avant le passage du texte, fin mars, devant le conseil d’État. Selon cette version, l’aide à mourir sera réservée aux patients-es majeurs-es, nés-es en France ou résidant de longue date dans le pays, et en mesure d’exprimer clairement leur volonté. Il faudra également ressentir des souffrances intolérables et impossibles à traiter, physiques ou psychologiques. Enfin, le pronostic vital devra être engagé à court ou moyen terme, une formulation qui laisse, de fait, une grande marge d’appréciation aux soignants-es. Une fois qu’un-e patient-e demandera d’être aidé-e au suicide, ce sera à un-e médecin de se prononcer après une procédure lui laissant jusqu’à 15 jours. Le-la professionnel-le de santé concerné-e le fera seul-e, mais forcément après avoir consulté d’autres soignants-es. L’exécutif considère qu’il y a ainsi un « équilibre » en créant un « modèle français » de la fin de vie. Cette position ne satisfait pleinement ni les adversaires ni les partisans-es de la légalisation de l’aide au suicide ou de l’euthanasie. Les premiers-ères (religieux, certains-es soignants-es…) expriment un vif rejet face à ce qu’ils-elles considèrent comme une dérive majeure. Selon eux-elles, il faudrait d’abord se préoccuper du développement des soins palliatifs, encore peu disponibles en France, pour s’assurer que des patients-es ne réclament pas de mourir faute de trouver une prise en charge adaptée à leurs derniers jours. Ce sujet figurera en partie dans le projet de loi et, parallèlement à celui-ci, une « stratégie décennale » des soins palliatifs doit être présentée en Conseil des ministres. Les partisans-es de l’aide à mourir dans la dignité regrettent des conditions trop restrictives. L’exécutif a pris le temps pour élaborer ce projet : une année, marquée par de multiples reports. Et l’assistance au suicide est encore loin d’être une réalité. Le texte va désormais entamer fin mai son examen par les députés-es dans l’hémicycle, début d’un long trajet parlementaire qui pourrait prendre jusqu’à deux ans avant l’adoption d’une loi en bonne et due forme. Ce n’est donc que le début…

    Vers un doublement des cas de cancers de la prostate d'ici à 2040

    Une étude publiée dans The Lancet estime que les cas annuels de cancers de la prostate passeront de 1,4 million à 2,9 millions en 20 ans, tandis que le taux de mortalité augmenterait de 85 %. Un constat qui appelle à réviser les stratégies de dépistage, note le Quotidien du Médecin. Cette étude a été présentée le 5 avril dernier au congrès européen d’urologie qui s’est tenu à Paris. Pour expliquer le phénomène, « de la population vieillissante et de l’augmentation de l’espérance de vie découleront un nombre plus élevé d’hommes âgés dans les prochaines années », écrivent les responsables de la commission du Lancet sur le cancer de la prostate, cités par le journal médical. Quant au taux de mortalité, il passerait de 375 000 décès par an en 2020 à 700 000 en 2040 (+ 85 %). Ces résultats ne cherchent pas à faire peur, mais à faire comprendre qu’il faut remettre en chantier une stratégie de dépistage plus efficace.

    Fin de vie : 1,1 milliard sur dix ans pour les soins palliatifs

    Le projet de loi sur la fin de vie est passé mercredi 10 avril en Conseil des ministres. Il ouvre le droit à une « aide à mourir » très discutée dans l’opinion publique, chez les professionnels-les de santé, dans la classe politique. En parallèle, le gouvernement s’est engagé à fournir un effort financier de 1,1 milliard d’euros annuels à terme, d’ici dix ans, pour les soins palliatifs. « En 2034, on aura 2,7 milliards d’euros (annuels) consacrés aux soins d’accompagnement. Soit 1,1 milliard de plus qu’aujourd’hui », avec une montée en charge progressive, a affirmé la ministre du Travail, des Solidarités et de la Santé Catherine Vautrin, samedi 6 avril, dans une interview au Monde détaillant la stratégie de l’exécutif sur les soins palliatifs rebaptisés soins « d’accompagnement ». « On a besoin d’aller plus loin dans la prise en charge de la douleur dans sa globalité et pour tous les publics, y compris les enfants », a mis en avant Catherine Vautrin précisant que ce plan gouvernemental « figure en partie dans le projet de loi sur la fin de vie ». « Avant l’aide à mourir, le modèle français de la fin de vie, c’est d’abord une politique ambitieuse de renforcement des soins palliatifs et d’accompagnement », a estimé la ministre. « Avant l’adoption de l’aide à mourir, on aura déjà augmenté l’offre de soins palliatifs car notre stratégie est, dans les dix ans, de donner une impulsion forte, et ce dès les trois prochaines années », promet la ministre qui pilote cette réforme sociétale-clé du second quinquennat d’Emmanuel Macron.

    Le projet de loi sur la fin de vie, qui devrait ouvrir la possibilité strictement encadrée d’une assistance au suicide, a été présenté en conseil des ministres, l’exécutif revendiquant l’équilibre au risque de décevoir partisans-es comme adversaires d’une aide à mourir. « Le projet de loi aura une première partie sur les soins d’accompagnement, une deuxième sur le droit des patients et des aidants, et une troisième sur l’aide à mourir », avait exposé Emmanuel Macron, il y a un mois. Avant l’annonce de la stratégie 2024-2034 pour les soins palliatifs, nourrie d’un rapport d’experts-es piloté par le Pr Franck Chauvin, Catherine Vautrin a plusieurs fois évoqué des mesures majeures en vue : création de 21 unités de soins palliatifs dans les départements en étant dépourvus ; « maisons d’accompagnement », pour compléter le dispositif entre l’hôpital et le domicile ; structuration d’une filière universitaire sur les soins palliatifs, etc. « Le nombre de patients qui nécessiteront des soins palliatifs va croître de 16 % en dix ans. Nous allons augmenter les crédits (aujourd’hui de 1,6 milliard d’euros annuels) de 66 % » progressivement d’ici 2034, ce qui se traduira par des « mesures nouvelles financées à hauteur de 100 millions d’euros » chaque année en moyenne, a précisé la ministre dans son interview au Monde. Les financements promis « sont une avancée importante. Mais on sera très vigilants sur l’inscription concrète des crédits dans le PLFSS [projet de loi de financement de la Sécurité sociale], car la version 2024 ne contenait pas une ligne sur les soins palliatifs », a observé Claire Fourcade, présidente de la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs (SFAP). « 2034, c’est loin, et on souhaiterait une inscription pluriannuelle », a-t-elle ajouté.